BLOW, BLOW ! - John Corso

- Et tu sais ce qu'elle me dit ? Que j'ai une vie merdique, et que je ne serais jamais heureux.
- Ah carrément ?
- Ouaip, truc dans le genre.

Tirant une taffe au comptoir du bar, John Corso regarda le barman du 'Véritaserum', attendant qu'il ne lui réponde. Si il y avait quelques personnes au monde qui pouvaient se vanter d'être ami de John Corso, il en faisait parti. Bien que ami soit un grand mot...

- C'est pas grave mec, c'est loin d'être la première fois qu'une fille te dit que t'est qu'un pauvre con qui n'arrivera à rien dans la vie... Depuis quand ca te touche ?
- Ca me touche pas.
- Bien sûr. Tu lui as répondu quoi ?
- J'ai retourné la situation, lui faisant remarquer que sa vie était bien plus minable que la mienne. C'est vrai quoi, elle a des allures de femme d'affaire, elle a un mari et des gosses... Elle est plus à plaindre que moi.

- Tu sais John, elle est comme la plupart des femmes de son âge... En fait, elle est comme moi, comme tout le monde... C'est toi qui...
- C'est pas parce-que vous êtes plusieurs à faire quelque chose que vous avez raison de le faire.
- ...

Tenant sa clope entre deux doigts, son ton avait été cassant, et le barman ne releva pas, laissant John boire sa bière tandis qu'il essuyait les chopes. John la finit cul sec et se leva doucement, se dirigeant vers la cible près du comptoir sur laquelle était plantée des flechettes. Il les prit, et vint se placer plus loin, face à la cible.

- Ce qui m'énerve c'est que ce soit elle.
- Quoi ? T'est amoureux d'elle ?
- Non.
- Alors quoi ?
- Je sais pas. C'est compliqué.
- Tout est toujours compliqué avec toi. T'est jaloux parce-qu'elle a réussit sa vie ?
- C'est quoi réussir ? Rentrer dans le cadre de la petite famille parfaite et du boulot qui rapporte ? Désolé, ce jeu m'interesse pas. Si je suis un pion, je veux jouer selon mes propres rêgles.
- John Corso, l'eternel rebel... Ca t'arrives jamasi de te comporter comme un être humain ?
- Un être humain, oui... Pas un mouton.

John accorda un sourire à Pete, et lanca une première fleche pas trop mal plaçée. Pete ne parlait plus, se contentant de nettoyer les verres tout en le regardant tirer les fleches suivantes, attendant qu'il ne parle.

- Et puis elle m'énerve avec ses manières la... Toujours droite, toujours hautaine... avec son petit tailleur noir, son petit sac à main, son rouge à levres petant... ses cheveux parfaitement coiffés, ses...

A chaque énumération d'élements de son physique qu'il balancait, il lancait une fleche qui se plantait avec force un peu partout dans la cible. Sa voix avait quelque chose d'amer et, en regardant où se plantaient les fleches, on pouvait en déduire qu'il n'était pas très concentré sur ce qu'il faisait. Pete, un sourire aux lèvres, tourna la tête vers l'entrée en entendant la cloche sonner. Il vit une superbe jeune femme entrer avec un petit garçon, en regardant John avec un sourire à la fois vainqueur et féroce. Pete, s'approchant discretement vers John, chuchotta en regardant la nouvelle venue:

- Heu... ta nana, elle est du genre super sexy avec un regard de killeuse ?
- Ouaip, pour...

John, en se retournant vers Pete, vit Key juste derrière. A peine eut-il le temps de remarquer le petit homme sous son nombril que déja, elle ouvrait la bouche.

- Mon Ange. Je te présente ton parrain, John Corso !

On entendit un fracas de verre brisé derrière le comptoir, mais aucun d'eux ne réagit. Key regardait John avec satisfaction, et le petit avec curiosité. John quand à lui, basculait son regard ténébreux de l'un à l'autre. Un temps, deux temps. Pour la première fois, il se retrouvait sans voix. Pour la première fois, il n'avait pas le contrôle de la situation. Mais il se reprit bien vite, John Corso ne pouvait pas perdre la façe, encore moins façe à Key. Il baissa une dernière fois les yeux vers le gamin, qu'il regarda un moment, comme si il le défiait du regard. Parrain... Savait-elle vraiment ce que cela voulait dire ? Si elle faisait de lui le parrain du petit, cela voulait dire que... Si il lui arrivait quelque chose (et le monde des sorciers n'était vraiment pas un monde sûr), le petit serait confié à John. Pourquoi ? Pourquoi lui ? Elle le détéstait, elle savait qu'il était un salaud, et certainement le pire des pères. Alors pourquoi lui ? John leva les yeux vers Key avec dédain et lui tourna le dos, se remettant façe à la cible.

- C'est une oeuvre de charité c'est ca ? Non merci, pas interessé. Je crois que t'a pas bien compris Key. Pas de contraintes. Tes ébats, tu les assumes.

Il tira une fleche mais le tire pitoyable trahit sa nervosité. Un jour, une fille avait débarqué à sa porte, lui presentant son ventre rond comme son fils. John lui avait dit à peu près la même chose. Mais il 'avait eu aucun remord. Ici, c'était different. Premièrement, c'était Key. De plus, parrain voulait dire accident, ou mort du parent. Et qu'on se le dise, John était particulièrement sensible à la mort de ceux qu'il aimait, bien que lui ait des tendances suicidaires. Il fixa la fleche qui venait de tomber, n'ayant pas tenue dans la cible suite à ce lancé raté. Il guettait toute réaction derrière lui. Mais une autre personne réagit, gênée:

- Hum heu... excusez-moi madame... je vous sers quelque chose ?

Assumes tes ébats... L'hopital qui se fout de la charité, John en était conscient. Si il y avait bien une personne qui n'assumait jamais ses actes, c'était bien John Corso. Mais il était bien connu que c'était un beau parleur, un donneur de leçons, qui lui même ne les appliquait pas. Et lorsqu'on lui reprochait, il répondait toujours la même chose...

Fixant la fleche au sol, il vit entrer dans son champ de vision le gosse. Celui-ci ramassa la fleche et la lui tendit. John le regarda. Il ressentit une pulsion, une envie de prendre le gamin dans ses bras. Le fait était que John adorait les gosses. Mais pas de contraintes, il n'en voulait pas. Et puis, ca collait pas avec son image. Sortant de ses pensées, il prit la fleche avec un regard plus doux qu'il ne l'aurait voulu. Essayant de reprendre son air dur et insensible, il le quitta des yeux et foudroya sa mère du regard avant de détourner de nouveau les yeux sur la cible. C'est à ce moment que Pete intervint pour demander si elle voulait boire quelque chose.

- Un verre d’eau et une citronnade. Mettez ça sur le compte de John, il payera bien un verre à son filleul.

John tourna brusquement la tête vers Key avec de grands yeux, comme si elle venait d'acheter une voiture avec son argent.

- Quoi en plus faut que je l'entretienne le marmot ? Il est pas question que...

Mais Key s'installait déja à une table. John la suivit et, lorsqu'il passa devant Pete, il plaqua avec fracas un billet sur la table, malgré lui.

- Je crois que...
- Qui parle John ? Tes propres ébats, les assumes-tu ? A mon souvenir, il me semble que non. Un exemple ? Tatiana. Pour ton propre plaisir. Tatiana est cette pauvre fille que tu as mise enceinte. Souviens toi, l’été dernier. Pas de belles paroles, fini les conneries. Assume ton rôle à présent !

BAM. Dans ta gueule John. Reculant d'un pas sous le regard impérial de Key, John resta bouche bée une seconde. Puis levant un doigt devant lui, il objecta:

- J'ai jamais dis que j'étais un mec bien.

Contournant Key, il vint à côté d'elle et tira une chaise sur laquelle il s'assit.

- Tu dis ca comme si c'était mon gosse, que je devais assumer. J'ai rien demandé moi. En plus, t'a pas le droit de me l'imposer. Il te faut mon avis. -Tournant la tête vers Pete qui s'y connaissait un peu plus que lui en Droit, il lâcha sur un ton presque suppliant- Non... ?
- Hum heu... je vais à la cave...

John le fusilla du regard avant de tourner de nouveau la tête vers Key.

- Sérieux, je suis sûr que t'a pleins de gens à emmerder avec... -il ouvrit des yeux ronds en regardant le gosse, arrêtant de parler, puis tourna la tête vers Key avec un regard suspicieux.- C'est juste pour me faire chier. C'est ca ? Tu sais que j'ai pas de thunes, que je vis dans un appart' merdique, que j'ai pas de boulot, pas de...

Une sonnerie de téléphone perturba le discours de Corso. S'arrêtant un instant, il sortit de sa poche son téléphone portable. il décrocha, puis un instant passa pendant lequel il n'eut aucune réaction si ce n'est de regarder Key avec un regard vide, laissant deviner que ses pensées étaient à des milliers de kilometres.

- C'est vrai ?

On ne pu entendre sa réponse... en revanche, la réaction de John ne fut pas des plus discretes... Poussant un cri de victoire en levant les bras en l'air, il se leva soudainement, envoyant voler sa chaise et se précipita vers le comptoir ou Pete remontait de la cave en courant, inquiet du cri de son ami.

- Ils ont accepté ! On a un contrat !
- Qui a accepté quoi... ?
- La maison de disque ! Je vais devenir riiiiche !
- Yeah John c'est géant ! Payes ta tournée !!
- Va te faire voir.
- Espece de radin !
- Hey doucement mec. Tu parles à une... rockstar.

John lui lanca un sourire avant de tourner la tête vers Key, avec un sourire carnassier. Il s'avanca, ayant plus que jamais son allure sûre de bad boy. Ca y était... John n'avait qu'un rêve, qu'une ambition: vivre de sa musique. C'est pourquoi il n'avait pas jugé utile de faire des études. C'est pour ca qu'il n'avait jamais tenté de trouver une situation stable. Il voulait vivre de la scène, que sa musique soit le moteur de sa vie. Il était un passionné de musique, et il avait toujours placé son avenir entre les cordes de sa guitare. C'était ce rêve, non, cet avenir qui l'avait poussé à avancer dans la vie. Et à force d'enchainer les petits concerts dans les bars, à force de jouer de groupe en groupe, une maison de disque avait accepté une de ses maquettes. Ils avaient signé un contrat et, d'après eux, la réussite de John Corso dans l'univers de la musique n'était qu'une petite question de temps. Il avait beau avoir été dans plusieurs groupes, c'était lui qu'ils avaient retenu dans chacuns d'eux. Il faut dire que John en plus d'être un excellent guitariste, chantait. Et sa voix était loin d'être banale. Mais il est clair que tout ce qui lui donnait ce charisme, cette prestence, c'était ce qu'il était capable de faire avec une guitare. John était désormais assis sur la chaise qu'il venait de quitter, la tête entre les mains, un sourire aux lèvres. Ca y était. Sa vie prenait un sens. John Corso allait sortir de l'ombre et réaliser son rêve. Il leva la tête vers Key et la regarda avec un sourire des plus purs, si rares venant de lui.

- Je t'avais dis que j'y arriverais.

Toute sa vie, à chaques fois qu'il avait revu Key, elle avait évolué. Elle avançait. Lorsqu'elle lui reprochait de ne rien faire de sa vie, il disait qu'il ne voulait rien faire d'autre que de jouer, que de devenir une rockstar. Il se rappelait de matins ou ils se réveillaient ensemble après avoir passé une nuit clandestine à flirter. Lors des matins comme ca, Key était réveillée par le petit son de guitare élèctrique qu'il jouait au réveil, selon son inspiration du matin. Key le connaissait mieux que beaucoup de gens. Et elle était bien placée pour savoir à quel point cela était important pour John.

Du côté du jeune homme, la vie prenait un sens. Tout paraissait beaucoup plus simple à présent. Certes, ce n'était pas encore gagné... Mais il était confiant. Il savait qu'il réussirait, il l'avait toujours su. Plus heureux qu'il ne l'avait jamais été, il paraissait soudainement plus serein. Souriant, il sortit son paquet de clopes et en déposa une entre ses lèves. Il tira une taffe, et sembla la savourer comme jamais il n'en avait savouré une. Key n'avait pas dit un mot. Il posa les yeux sur elle, puis tira une nouvelle taffe en se déléctant de la voir. Il n'avait même pas le coeur de la provoquer, de jouer le vainqueur. Ca, ce serait pour plus tard, une fois la bonne nouvelle digérée. Non, il se contenta de lui sourire avant de laisser tomber sa tête en arrière, crachant des ronds de fumée.

- T'a tout de même pas intêret à crever avant ses 18 ans.

Il baissa le regard vers elle une seconde, lui adressant un clin d'oeil, puis laissa de nouveau tomber sa tête en arrière, laissant divaguer son esprit tandis que Pete apportait la boisson du petit et deux bières, histoire de marquer le coup.

ce rp est-il tj d'actu?