Elle-

-Premier post pour Autumn-

You know there's still a place for people like us

Les Dimanches, ah, les dimanches...

Un jour morne, effacé, où on compte inlassablement les minutes qui s’écoulent. On espère, on réfléchit, parfois même on arrive à trouver du plaisir à toute cette mascarade. On efface la routine, on fait preuve d’une attention extrême, on se raccroche à la réalité en passant du temps à la contempler. Des jours à ne rien faire, à seulement explorer son passé, son présent, et le peu d’avenir qu’on peut entrevoir et qu’on peut imaginer. On se laisse faire, emporté par la raison, par la fraîcheur du matin qu’on ne voit pas passer. L’instant parfait ; celui où on s’endort et où on se réveille que lorsqu’on en a l’envie, que lorsqu’on se sent apte à se montrer au grand jour. Autumn n’avait pas été prête. Elle était restée dans son dortoir sombre, lugubre, réfléchissant aux différentes raisons qui la poussait à être ainsi, à ne plus vouloir y croire. Mais croire à quoi ? A tout, certainement. Smiley était le genre de fille rêveuse, un peu trop pour pouvoir accepter la réalité une fois avoir mit les pieds sur Terre. Elle était comme tout le monde, noyée dans un surplus d’atrocités, baignée dans un monde qu’elle n’avait pas voulu, un quotidien à en faire frémir plus d’un. Tout ça pour quoi ? Pour lui, pour son regard, son simple sourire, ce qui était devenu sa vie. Il rythmait les battements de son cœur, elle était devenue sa poupée, son pantin, une simple fille agenouillée devant sa beauté. Oui, elle qui s’était toujours fait la promesse de ne pas craquer, de ne pas s’abaisser à ce point… Décidément, elle avait manqué son coup.

Puis, parfois, le Dimanche réserve des surprises. Bonnes ou mauvaises, elles sont là pour te montrer que la routine est une chose qui ne tient qu’à un fil. Aujourd’hui, c’était Russel. Un rendez-vous dans le cimetière moldu pour parler sous le simple prétexte qu’il trouvait le temps long. Oui, son Serpentard préféré était…surprenant. La jeune vert et argent avait décroché un minuscule sourire, avant d’enfiler rapidement ses vêtements. Quitter ce foutu château, enfin ! Elle allait avoir la paix, et enfin elle ne verrait plus ces petites dévergondées qui lui sautaient dessus pour qu’elle les accompagne on-ne-sait-où. Et puis, Autumn n’avait pas eut le choix. Elle allait y aller, elle allait le voir, lui sourire d’un air désespéré en espérant qu’il ne dise rien, mais il savait tout. Il lisait dans son regard, percevant les moindres failles, et faisait en sorte qu’elle aille mieux avec certaines attentions qu’il ne faisait que très rarement à l’ordinaire. L’inviter comme ça, pour parler que tous les deux, c’était étrange. En une trentaine de minute, elle avait su rejoindre le sentier qui menait au fameux cimetière. Un endroit louche, relevant presque du macabre. Une atmosphère froide, des tombes à perte de vue ; un endroit parfait pour des retrouvailles dans ce genre. Etant ailleurs en ce moment, Autumn avait un certain mal à montrer de l’attention, voir même de parler. Le silence, elle détestait ça. Pourtant, c’était devenu une habitude depuis quelques semaines.

Là haut, sa silhouette. Sombre, grande, marchant lentement. Elle frissonna quelques instants, le contemplant comme au premier jour, jusqu’à le rejoindre de plus en plus rapidement. La fatigue, encore et encore. Même loin du château, elle était omniprésente. Son teint pâle, son visage de poupée de porcelaine, ses ailes d’ange…Tout ça était partit, laissant place à une carcasse digne de celle d’un mort. Et encore, un mort sourirait sûrement à l’idée de marcher à nouveau dans les feuillages d’un endroit comme celui-ci. Sa petite main d’enfant se posa alors sur l’épaule du jeune Mustang, jusqu’à ce qu’elle fasse glisser son souffle dans sa nuque. A présent qu’il savait qu’elle était là, la petite brune vint se placer à ses côtés, ses yeux bleus n’osant quitter le sol pour rejoindre ceux de son ami. Le silence, toujours ce fameux silence. Il était comme les dimanches : complètement répugnant, amer. Mais de le voir lui, ça changeait la donne. C’était différent. Mieux que ces journées où on oublie tout, mieux encore que nos rêves les plus merveilleux, mieux que les souvenirs douloureux qui nous font voir comment nous avons laisser filer le bonheur…Oui, il était mieux que tout. Comme Aaron.

« Russel… »

Un murmure, et elle accélère le pas, laissant le jeune Serpentard seul derrière. La pluie commence alors à montrer le bout de son nez, ce qui n’était pas pour lui déplaire. Levant alors la tête, la jeune Perkins ferma les yeux quelques secondes, s’arrêtant brusquement. Sa respiration se faisait de plus en plus forte, tout comme les battements de son cœur. Mais rien ne pouvait l’empêcher d’être là, à lui parler, à contempler ce qu’elle avait toujours refuser le voir. Le bonheur, l’amour, l’amitié… Des notions qu’elle s’était à tout jamais refusés.

« Pourquoi cette invitation ? J’imagine qu’il y a une raison pour que tu me traînes jusqu’ici. »

The circle never end.

Il n'eut pas à attendre longtemps. Tant mieux. Russel avait une patience limitée, certes présente, mais restreinte. Le Serpentard avait à peine posé ses yeux noirs sur la plaine tapissée de sépultures qu'une main frêle effleura son épaule. L'air ambiant se rafraichissait, l'astre solaire sembla se cacher derrière une masse de nuages gris, comme se soumettant aux deux Serpentard prônant l'obscurité depuis toujours. Le jeune Mustang se tourna vers sa vipère à la mine pâle, ses yeux luisant d'une douleur prequ'indiscible, la jeune fille avait perdu ses couleurs, se confondant parfaitement avec le décor morbide des lieux. Un macchabée parmi tant d'autres. Les yeux sombres de Russel ne s'adoucirent pas, au contraire ils se faisaient feu, glace, roc. Face à cette impuissance, de ne pouvoir l'aider dans l'immédiat, il se haïssait de ne pas avoir le coeur des sages, et de ne pas avoir la parole juste. Il se maudissait de ne pas avoir veillé sur elle d'avantage, la laissant agoniser d'une sombre angoisse qui semblait incurable. Aucun sourire ne vint se dessiner sur son visage si pâle, Russel ne prêtait plus attention qu'à la voix faiblie de sa vipère. L'attitude glaciale du Serpentard n'était pourtant qu'une preuve de plus qu'il tenait à elle.

« Russel… »

Pas de réponse. Le jeune homme ne supportait pas ces yeux baissés, cette soumission pliée d'Autumn. Qu'était devenue la jeune fille combattive et assoiffée de jeux macabres, elle qui était une joueuse si douée ? Qui donc avait eu l'audace d'arracher Perséphone aux enfers, la trainant vers la lumière aveuglante ? A moins que le venin de Russel ne l'ait que trop affaiblie, lui qui prônait l'absence de sentiments afin de porter en piédestal leur sombre pouvoir. Le Serpentard ne la quittait pas des yeux, adoucis cependant par la détresse de son amie. Aucun mot ne parvenait à s'échapper de ses lèvres blêmes, sa parole aussi froide que son coeur n'arrivait pas à teinter ses mots d'un peu de chaleur, lorsque cela était sincère. Sa vipère avança de quelques pas, lui tournant le dos, ses longs cheveux voletant dans la brise fraîche qui battait également le sombre manteau du Serpentard, immobile. La pluie commença à tomber finement, comme pleurant pour le coeur de la douce Perkins qui ne demandait qu'à se noyer. Il n'y avait pas plus idyllique que ce sombre tableau jouant la tragédie d'une âme égarée. S'il le fallait, Russel se sentait prêt à protéger Autumn des coups assaillis par la vie. Mais bien avant, il lui devait de comprendre exactement ce qui la rongeait de l'intérieur.

« Pourquoi cette invitation ? J’imagine qu’il y a une raison pour que tu me traînes jusqu’ici. »

Enfin il esquissa un bref sourire, s'avançant toujours taciturne vers la jeune fille, sa plaçant à sa hauteur mais les yeux tournés vers les tombes de pierre. Le Serpentard percevait le malêtre de sa vipère, son coeur battant trop fortement la faisait trembler fébrilement, mais il n'avait pas la tendresse qu'il fallait, pour la prendre dans ses bras. Pas encore. Touché par sa détresse néanmoins, il sentit son sang se glacer, pour la première fois depuis longtemps. Après quelques longues minutes de silence balayées par le souffle sifflotant du vent, Russel parla enfin dans un sourire.

R.~ Tu crois qu'ils ont vécu la vie qu'ils ont voulu ? Ou bien ont-ils été les marionettes du destin. Incapables de vivre vraiment...

Presqu'un murmure, un air pensif, des paroles réfléchies, mais une moue significative, il s'en fichait. Ses yeux sombres toisant ces sépultures branlantes avec une sorte de contemplation macabre. Russel étouffa soudain un rire, dévoilant ses canines, et ce fut dans un sourire qu'il se tourna vers Autumn. Russel se préoccupait déjà bien peu des vivants, ce n'était pas aux morts, qu'il allait faire cet honneur. Néanmoins, derrière ces phrases banales, empruntes d'un humour noir prouvant que ces morts étaient d'un désinterêt évident, se cachait quelque message à l'adresse de sa vipère.

R.~ Non... J'en ai rien à foutre. C'est de toi que je me préoccupe.

Aucune réponse dans l'immédiat, Autumn semblait figée dans son désarroi. Russel la fixa quelques instants dans une inquiétude dissimulée par un masque de froideur, reportant son attention sur les sépultures frappées par la pluie qui se faisait plus drue. Il était fortement possible, que Vanna Syl en soit la cause. Avant lui, sa vipère n'était que pétillance et rose empoisonnée, avant lui ils refaisaient le monde ensemble, le baignant de sang dans leurs rêves démesurés, avant lui elle avait ses couleurs.

R.~ Nous sommes des Rois, Autumn, n'y a-t-il jamais rien eu qui ne nous soit refusé ? Mais il y a tant de choses que nous nous devons de rejeter.... La couronne est trop lourde pour toi, pas vrai ?

Ses mots lents résonnaient avec une froideur morbide sur la plaine surplombée. Clamer ainsi sur le domaine de la Mort, parsemée de multiples tombes, qu'ils étaient souverains avait un goût suave et exquis, mais cela donnait également au tableau un côté sombrement macabre. Sa vipère ne pouvait que comprendre ce qu'il souhaitait lui dire, Russel ne parlait toujours qu'en filigrane, il fallait savoir lire entre ses lignes. Leur splendeur ne pouvait être glorifiée que s'ils laissaient de côté leur bonheur, l'amour, et la véritable amitié. Si le Serpentard s'en contentait fortement, trompant l'amour et limitant l'amitié à ses deux vipères, il n'était pas certain qu'Autumn s'en accomode. S'il avait vu juste, cela serait sans doute la première fois qu'il comprendrait autant une personne. En outre il était rare que le Serpentard ne se penche sur les problèmes des autres. Mais c'était ici différent, elle était différente, elle était sa vipère. Ses problèmes étaient les siens.

R.~ Tu seras toujours des nôtres, Nyla et moi ne te blâmerons pas pour tes choix.

Un petit pincement au coeur, toutefois. La perdre était quelque chose d'irréalisable. Que son coeur choisisse d'être heureux, qu'il penche vers Aaron, mais qu'il ne l'entraîne pas chez leurs ennemis. Qu'il ne l'attire pas là où la magie blanche pense être de bonne foi, qu'elle reste sa vipère.

R.~ Au pire je viendrais seulement te mordre,

rajouta-t-il avec une pointe d'humour froid, si bien que l'on pouvait se demander s'il s'agissait réellement d'une taquinerie ou non, malgré son sourire amusé.

A présent commencent les notes douloureuses, à se faire entendre ; à présent je suis venu, là où les pleurs frappent.

En y réfléchissant de plus près, Autumn n’était pas le genre à se confier si facilement. Elle n’aimait pas se mettre à nue à ce point, dire ses failles, ses peines, ce qui la rendait aussi mélancolique de jour en jour. Oui, au fond, elle détestait ça. C’était se dire faible, loin des autres, loin de cette perfection irréaliste, presque utopique. Parfois, il fallait faire preuve d’une grande bravoure pour la comprendre. Il fallait aller plus loin que ce visage pâle, plus loin encore que son sourire sarcastique et ses paroles criblées de sous entendus. Creuser encore et encore, c’était une éternelle fouille qui s’avérait être insurmontable. Les gens se perdent en chemin, en oublie leurs principes sous le simple prétexte de vouloir la connaître un peu plus, un peu mieux que la veille. C’est pour ça qu’elle était là, avec lui. Qu’elle le dévisageait avec une douceur exemplaire, une attention toute particulière. Russel était une des rares personnes à avoir eut l’audace de percer le grand mystère, car en un regard, il savait exactement si Autumn mentait ou pas. Comme le grand frère qu’elle avait toujours rêvé d’avoir, le confident le plus silencieux et mystérieux de la planète, cet être qui vous aide à tenir durant les épreuves, qui reste là, impassible, neutre, à contempler vos moindres faits et gestes sans les juger…Oui, c’était ça entre eux. Un silence léger, planeur, rêveur, qui vous embaume le cœur, vous le recouvre d’un voile qui vous le protège le temps d’un sourire, pour faire en sorte qu’il ne prenne pas froid, qu’il soit toujours là, toujours aussi splendide qu’avant… Comme à la naissance, comme ce jour merveilleux où vous apprenez la vie. C’était ça, quand il était là. Exactement ça, d’ailleurs…

Cette sensation de ne plus être seule, d’être à l’abri du reste du monde. C’était la même chose qu’avec Nyla. Deux anges, deux cadeaux qu’elle ne pouvait refuser. Ils étaient de plus en plus importants aux yeux d’Autumn, plus qu’elle ne le disait. La petite brune était loin de leur dire ce qu’elle ressentait, mais le fait était là ; elle ne pouvait plus se passer d’eux. A chaque fois qu’elle se retrouvait seule, elle faisait en sorte de les garder en elle avec des photos, des tas de souvenirs enfouis dans sa pauvre mémoire. Le passé, le présent, peut être aussi le futur. C’était avec eux qu’elle voulait les conjuguer. Accomplir leur devoir, celui de faire revenir cette magie trop oubliée aujourd’hui. Faire revenir la terreur petit à petit, faire ressurgir le pouvoir et la puissance pour qu’enfin le monde s’agenouille devant eux. Oui, ils voulaient avoir cette force de pouvoir tout contrôler. Enfin, on connaissait la suite. Ils succombent, se liguent les uns contre les autres, puis finissent par se haïr au plus haut point, ne combattant plus main dans la main, mais plutôt chacun de leur côté. Autumn ne voulait pas s’y risquer, préférant ne rien dire, ni même y penser. Elle était loin. Trop loin.

« Tu crois qu'ils ont vécu la vie qu'ils ont voulu ? Ou bien ont-ils été les marionnettes du destin. Incapables de vivre vraiment... »

Autumn déglutit alors, fixant les tombes avec stupéfaction. Jamais elle n’avait prit la chose sous cet angle, c’était ça le plus terrifiant. On avait tous le choix ; vivre, ou bien survivre. Ce qu’elle était en train de faire, ce n’était pas la meilleure des décisions. Elle aurait très bien pu partir, ne voulant affronter ce genre de conversation. Ou bien pire encore ; se jeter sous un pont sans craindre le monde qu’elle rejoignait. Mais elle préféra rester là, pétrifiée, fixant les pierres tombales comme ci sa vie en dépendait. Elle rougissait, puis devenait plus pâle et, à nouveau, elle retenait ses pauvres larmes qui ne demandaient qu’à s’échapper. Non, elle ne pleurerait pas devant lui. Il risquerait de la croire faible, insignifiante, voir même complètement lâche. Il fallait absolument cacher cette vérité immonde, parce qu’Autumn était censé ne rien ressentir, et pour personne. Elle ne devait être qu’une carcasse vide, un ange noir, une étoile complètement éteinte, comme la flamme d’une bougie en plein vent… Elle ne devait pas être comme les autres, ni même comme sa mère. Il ne fallait pas que cette petite poupée de porcelaine fasse la même erreur que ses parents.

« Non... J'en ai rien à foutre. C'est de toi que je me préoccupe. »

« Comment ça…Je… »

Ferme la, Autumn. Non, tu ne vas pas bien, non, tu n’es pas seulement « overbookée ». Arrête de te morfondre dans ton coin, à attendre que le jour passe pour pouvoir pleurer la nuit. Assez ! Il t’offre l’occasion de tout dire, alors ne le fait pas attendre. Comme ci tu allais lui faire gober ce mensonge ! Quelques secondes passèrent, des instants beaucoup plus pesants que les précédents. La jeune Serpentard fixa le sol inlassablement, ne pouvant voir la vérité en face. Il fallait rester forte jusqu’au bout, ne rien dire, tout garder une fois de plus. Mais elle lui devait tant qu’elle ne pouvait se résoudre à garder le silence… Fermant peu à peu les yeux, la belle poussa un soupir presque inaudible, sentant les gouttes de pluie lui caresser la peau, s’écoulant le long de ses épaules frêles et presque nues. Aussitôt, il la coupa, répliquant quelque chose. Le cœur de la jeune vert et argent s’arrêta de battre, le temps qu’il finisse sa phrase. C’était comme ci elle venait d’être prise sur le fait. Oui, c’était ça… Ces mêmes frissons, et ces tremblements suspects…

« Nous sommes des Rois, Autumn, n'y a-t-il jamais rien eu qui ne nous soit refusé ? Mais il y a tant de choses que nous nous devons de rejeter.... La couronne est trop lourde pour toi, pas vrai ? »

« Certainement… Je n’sais même plus ce que je veux. J’suis complètement perdue, et partagée…Oui, c’est ça. Partagée, parce que j’ai peur…J'ai peur de souffrir... »

Autumn rouvre les yeux, prenant la force nécessaire pour continuer à marcher. Ses yeux bleus vinrent immédiatement à la rencontre de ceux du jeune Mustang, jusqu’à ce que les larmes commencent à prendre la fuite, une à une, coulant le long de ses joues blanchâtres. Autumn afficha alors un pâle sourire, un sourire presque invisible tant il était noyé de larmes. A cet instant précis, la jeune Perkins recula de quelques pas, désirant plus que tout s’enfuir le plus loin possible, là où personne ne la retrouverait. C’était lâche, mais elle n’en avait plus rien à faire… Elle continua ainsi durant des secondes entières, marchant à reculons, lentement, comme ci elle attendait un signe du destin. Puis, au bout d’un certain temps, elle se figea, tétanisée.

« Tu seras toujours des nôtres, Nyla et moi ne te blâmerons pas pour tes choix. »

« … »

Un gloussement, et la belle revient tout à coup sur ses pas, se jetant dans les bras de son ami. Allez, voyons. Voilà qu’elle sanglote, incapable de se rendre compte qu’elle avait complètement défaillis. Son cœur battait de plus en plus vite, accélérant à chaque fois la cadence. Si elle avait eut les idées claires, elle aurait pu penser qu’elle était déjà en Enfer. Même chaleur atroce, même atmosphère lugubre. Seulement là, dans les bras d’un ange, elle ne pouvait douter que le Paradis lui était ouvert. Oui, elle regrettait d’être venue, elle regrettait de n’avoir pas su combattre comme il le fallait. Combattre ce drôle de sentiment qu’est l’amour… Voilà. Un jour, il faut se rendre à l’évidence. Depuis qu’elle avait rencontré le jeune Vanna Syl, c’était tous les jours la même chose, la même rengaine.

« Au pire je viendrais seulement te mordre. »

« J’y compte bien… »

Un petit rire, et Autumn s’écarte peu à peu, dévoilant ainsi son visage de poupée. Ses joues étaient humides et rosies, tout comme ses yeux bleus, mais elle ne pouvait effacer ce sourire chaleureux. Ne savant plus où se mettre, elle trouva enfin refuge dans le ciel gris et vaporeux, ne pouvant détacher son regard de ce spectacle extraordinaire. En fonçant tête baissée dans ses bras, la jeune Serpentard avait à nouveau prouvé qu’elle était trop sentimentale. Un vrai supplice, en somme.

« Désolée… J’fais n’importe quoi en ce moment… »

Parfois le mot partir nous amène à souffrir.

Elle se voilait la face, se persuadant qu'elle n'avait plus ces sentiments lui arrachant des faiblesses. Non ils n'étaient pas différents sur ce point. Ils demeuraient inlassablement les mêmes. Autumn avait seulement bien plus de mal à s'y faire, ce mal qu'ils s'étaient instauré tous les trois, lui rongeait les entrailles. Russel serra les dents. Lui qui portait cette qualité comme un trophée, avait incité ses vipères à taire leur coeur sans le savoir. Il savait en cet instant, lisant dans les yeux de sa douce protégée, qu'elle avait peur de lui offrir ses larmes. Peur qu'il ne la traite de faible, peur peut-être qu'il ne lui offre qu'un sourire froid, avant de s'en aller. S'il s'était agit d'une toute autre personne, cela aurait été ainsi, que le Serpentard aurait mit un terme à la conversation. Mais c'était elle. Il se sentait coupable d'avoir voulu instaurer le tabou des sentiments. Si Russel s'en accomodait fort bien, il découvrait en ce jour que c'était cette régle macabre qui faisait entre autre perdre ses couleurs à Autumn. Ainsi ses pressentiments avaient eu raison de lui, Russel faisait partie de ses tortionnaires. Là encore, il ne put autoriser ses sentiments se porter réconfortants. Il aurait voulu lui demander pardon, lui dire que ce n'était rien, qu'elle resterait son ange. Mais rien. Un Mustang n'avait pas à se repentir, il n'avait pas à se faire pardonner, son coeur desséché ne parvenait à rien. Incapable. Ses hautes ambitions l'interdisaient d'aller de l'avant. Pour se préserver, il ne pouvait démontrer son affection envers elle. Pourtant, la douce poupée en avait besoin.

Démon sans coeur.

Russel ne réagit toujours pas. Ce qui en soit était déjà positif, il n'avait pas tourné les talons sous cette effusion de sentiments. Il était là, à l'écouter, dans toute sa froideur dérangeante, la fixant de ses yeux sombres. Et pourtant une certaine douceur alluma son coeur trop sec. Une envie de lui sécher les larmes trop prenante. Le jeune homme baissa les yeux. Un exploit. Signe déjà implicite qu'il était désolé, et impuissant face au malêtre de la jolie Perkins. Pourquoi ne pas lui avouer, lui aussi, qu'il ne voulait pas la perdre ? Car cela était déjà avancer ses faiblesses, en proie à d'éventuels ennemis, pourquoi donc était-il Russel Mustang, ne pouvait-il pas être quelqu'un d'autre ? Une vie sans raison d'être, terne et seulement sublimée par ces instants sanglants qui sortait son quotidien de la routine. Envie d'en finir Autumn ? Moi aussi... La couronne est trop lourde pour chacun d'entre nous. Savions-nous qu'il était aussi difficile, de régner sur les Enfers ? Nous restons humains, malgré nous, nous les démons de l'autre monde, éprouvons des sentiments. Âmes maudites à jamais. Ainsi ne nous séparons pas.

R.~ Nous sommes des Rois, Autumn, n'y a-t-il jamais rien eu qui ne nous soit refusé ? Mais il y a tant de choses que nous nous devons de rejeter.... La couronne est trop lourde pour toi, pas vrai ?

« Certainement… Je n’sais même plus ce que je veux. J’suis complètement perdue, et partagée…Oui, c’est ça. Partagée, parce que j’ai peur…J'ai peur de souffrir... »

Peur de souffrir... Russel n'en éprouvait rien, sa souffrance était quotidienne, et s'était ainsi faite sa compagne morbide. Autumn n'en avait pas besoin. Etait-ce un bien, qu'elle reste parmi eux? Toujours de son air froid, il ne lâcha pas son ange du regard, dont des perles humides commençaient à couler sur ses joues rosies. Alors c'était pour cela, que le ciel pleurait... Il pleurait ses larmes glaciales de voir son ange en larmes. Elle s'éloignait, elle avait peur. Le Serpentard ne bougea pas, il ne pouvait qu'attendre la suite des événements. Enfin son regard se posa au loin, pensif, les paroles d'Autumn résonnant dans son esprit. "Je suis perdue et partagée" Russel hocha la tête distraitement, et si en elle se jouait une lutte infernale, celle où elle se devait de choisir entre Aaron et l'amour qu'il portait pour lui, et Russel et Nyla, vides de tout sentiments.

Le Serpentard passa rapidement sa langue sur ses lèvres blêmes, qu'il pinça de ses dents blanches dans un instant de questionnement. La pluie s'abattant sur les deux camarades laissait une sensation glaciale contre leur peau, mais ils ne semblaient pas en tenir compte outre mesure. Elle allait partir vers Aaron. Sombre ressentiment, son coeur de pierre semblait s'emballer doucement. Russel ferma alors les yeux quelques secondes, pesant chacun de ses mots comme si son avenir en dépendait.

R.~ Tu seras toujours des nôtres, Nyla et moi ne te blâmerons pas pour tes choix.

Il avait dit ce qu'il avait à dire. C'était tout du moins sorti du coeur, ses paroles étaient foncièrement sincères. Elle ne répondit pas cependant. Ainsi, il allait tourner les talons, la laissant dans son choix. Cependant le Serpentard eut à peine le temps d'esquisser un mouvement que déjà il sentit Autumn lui sauter dans les bras, dans un impact qui le fit reculer d'un pas. Ce geste soudain lui arracha un tendre sourire. D'abord troublé, entourant son ange de ses bras sans oser la toucher, il finit enfin par l'enlacer d'un geste incertain. Les yeux fixes de Russel, portés dans le vide se fermèrent alors, une douce fraction de secondes, sa tête reposée contre celle de sa vipère. Pleurs je recueillerai tes larmes dans un écrin et les porterait en pendentif, parce que j'ai conscience de ce que tu représentes pour moi, mon ange. Il était étrange de voir se dessiner autant de tendresse dans ses gestes, d'habitude si carnassiers.

R.~ Au pire je viendrais seulement te mordre.

« J’y compte bien… »

Des mots amusés, Autumn se dégagea alors de son étreinte dans un sourire, que Russel lui rendit aussitôt. La pluie bénissant cette consécration, celle de l'ange enfin soulagé. Il ne pouvait plus être sans coeur, ne serait-ce que pour elle, ne serait-ce que l'espace de ce moment. Sa vipère s'excusa alors mais le Serpentard posa alors un doigt fin sur ses lèvres rosies.

R.~ Shhh... On ne s'excuse pas auprès de moi, je ne pardonne pas.

Le jeune homme lui sourit de nouveau. Si ses paroles s'avéraient vraies lorsqu'il s'agissait d'autres personnes, elles ne s'appliquaient en rien au cas d'Autumn. Russel souhaitait seulement lui faire comprendre qu'elle n'avait pas à rougir de cet acte, bien qu'il n'était pas habitué. Ainsi soulagée, le Serpentard pouvait enfin savoir ce qui tracassait la douce Perkins.

R.~ Tu as peur de souffrir, parce que tu as toujours caché tes sentiments. Mais dis moi ce qui vraiment te tracasse. Vanna Syl ?

Bien sûr que c'était cela. Quoi d'autre ? Une histoire à surveiller de près, tant les deux amants semblaient aussi complexes l'un que l'autre. Les affaires de coeur, bien peu pour lui, mais il s'évertuerait l'aider comme il le pouvait. L'ange noir avait un coeur. Pour elles seulement.

« Shhh... On ne s'excuse pas auprès de moi, je ne pardonne pas. »

Qu’est ce qu’elle devait répondre à ça ? Lui dire ce qui la poussait à étaler ses sentiments, ou bien partir en courant en guise de réponse ? Autumn, ma belle Autumn. L’hiver est rude, en ce mois de Janvier. Ton cœur se glace, se brise, et tu n’as toujours pas trouvé un moyen pour le lui dire. A lui, à ce vampire que tu aimes tant, à cet être qui tient une place toute particulière dans ton cœur. Et Nyla, à elle aussi tu ne lui as rien dit. C’est comme ça qu’elle allait finir ses jours ? Dans un silence amer, prisonnière de ces émotions stupides, de ces moments intenses qu’elle aimerait regretter ? Non. Il était hors de question qu’elle se voile la face plus longtemps : ce qu’elle a fait, les erreurs commises ; tout ça, ça se réparait, non ? En un sourire, en un regard. Avec le temps, elle allait pouvoir changer. Changer cette image, changer ce regard si pessimiste. Assez ! Autumn était quelqu’un pleine de vie, et non pas cette carcasse morbide, dépourvue de tout contrôle ! Ce n’était qu’une caricature, et même si elle se le cachait, elle savait pertinemment qui était le problème et comment il fallait le régler. Tout ramenait à elle, ces derniers temps. Smiley, la douce Smiley n’était plus qu’un sourire brouillon. Fallait-il y remédier ? Certainement que oui. Il était le seul à pouvoir le faire. Lui, ce beau Lion, ce grand Chevalier qu’elle rêve d’avoir en Prince… Un regard, et elle était toute à lui…

Les secondes s’étalaient comme des pétales de roses sur un sol poussiéreux. Ce cimetière était désert, mystérieux, mais elle ne prenait pas le temps de le contempler, elle qui pourtant adorait ce genre d’endroit… La jeune vert et argent n’accorda plus aucun regard à son vampire. Pas même l’ombre d’un sourire ne vint se tracer sur ses jolies lèvres. Elle pensait, s’était mise à prier le seul Dieu qui lui restait pour pouvoir tout oublier, pour pouvoir tout recommencer. Il y avait des tas de choses à modifier. Mais les regrets, la belle brune les avait toujours haït… Elle était incapable de savoir si elle rêvait vraiment ou non, incapable de savoir même où elle mettait les pieds. En s’embarquant dans cette folle histoire, elle n’avait pas réfléchit, en n’avait pas vraiment eut la force, trop hypnotisée par son regard et sa voix. Le coup de foudre qu’elle s’était promit de ne jamais avoir. Certains lui auraient dit qu’elle se trompait, qu’elle avait tout faux. D’autres, comme Nyla, comme Russel, lui diront certainement de suivre son cœur, qu’importe ce qu’il advienne plus tard, sans qu’elle perde ses racines et ses ambitions. Comment pouvait-elle faire ? Suivre son cœur…Merde ! Des années sans se rendre compte qu’elle en avait vraiment un, et qu’il ne servait pas qu’à la maintenir en vie, et maintenant… Maintenant, on lui demandait de l’écouter, de le laisser faire ! N’importe quoi. Des foutaises, tout ça… Simplement des foutaises ! Elle était au dessus de tout ça, au dessus de cette faiblesse. L’amour, c’était ça. Un truc pour les faibles, et non pour elle…

La jeune Serpentard secoua légèrement la tête, de gauche à droite, puis déglutit lentement. Ses iris bleus vinrent se poser à nouveau sur les pierres tombales, les dévisageant chaleureusement. Oui, à la vue de ces tombes, elle ne pouvait ressentir que de la compassion. Ce désir intense de vivre tout jusqu’au bout, de ne pas en perdre une miette, car elle détestait ne pas vivre à fond. Par respect pour sa mère, elle devait accomplir ce devoir. Avoir vécut autant d’épreuves pour ne rien en tirer ? Bien sûr que non. Autumn était bien décidé à mordre la vie à pleine dent, se prouver à elle-même que durant des années, elle avait eut raison de croire aux contes de fées. Des années qui ne se perdaient pas, et qui continuaient à exister dans son quotidien. Oui, Autumn devait y croire, ne serait-ce que pour apercevoir le bonheur, même de loin. Elle devait voir sa fine silhouette, son souffle chaud, ses mains douces. Le bonheur, quelle notion stupide. On l’emploi sans cesse sans vraiment savoir de quoi on parle. Et puis, peut être que son bonheur à elle était déjà tout trouver ? Qui sait, c’était sûrement ça la réponse à toutes ses questions…

« Tu as peur de souffrir, parce que tu as toujours caché tes sentiments. Mais dis moi ce qui vraiment te tracasse. Vanna Syl ? »

« … »

La poupée de porcelaine se brisa en quelques paroles, plantant son regard océanique dans celui de son ami. Elle fondait instantanément, comme une glace sous le soleil, comme du verre qui brûle depuis un certain temps déjà. Rien qu’à l’écoute de son nom, elle sentait déjà les larmes surgir, luttant pour ne pas le montrer. Ses mains s’étaient mises à trembler, et puis très vite, la jeune Perkins se sentit tomber au sol. Non, elle était toujours debout. Elle se battait pour ne pas fondre en larme par terre, résistait tant bien que mal pour ne pas partir à nouveau, fuir comme elle aurait toujours voulu faire. L’attente devenait pesante, tout comme ce silence poignant. Elle se devait de répondre, même si c’était difficile, même si elle devait se forcer. Il fallait que, pour une fois, elle parle. Qu’elle dise à quel point elle ne supporte plus tout ça, ni même à quel point elle se déteste de pouvoir faire souffrir autant quelqu’un. Elle n’était pas faite pour les romances, même si elle en rêvait chaque jour. Non, elle n’était pas faite pour les contes…

« Russel… Je crois que… »

Les larmes coulent, perlant le long de ses joues rebondies. Elles viennent se poser sur le coin de ses lèvres, lui faisant goûter au délice suprême de cette sensation humide. Peu à peu, les larmes se multiplient, se regroupant au bord de ses yeux bleus, virant parfois au gris. Elle tremblait d’avantage, mais ne pouvait s’empêcher de sourire rien qu’à cette pensée. Ce goût amer qui s’imposait dans sa bouche à chaque larme déposée, cette humidité qu’elle sentait jusqu’au creux de son cou. Tout ça l’enchantait. Oui, elle était capable de tout ça. Oui encore, elle était à la hauteur de ces Princesses parfaites, en quête d’amour impossible, mais qui s’avèrent tout aussi réalistes que la réalité elle-même. Oui, Autumn June Perkins était une princesse. La sienne, seulement la sienne, condamnée à aimer son preux Chevalier.

« …Je l’aime… »

A-t-on vraiment le choix ?

« Russel… Je crois que… »

Un silence. Le coeur qui s'arrête de battre, ses yeux sombres se posent sur sa vipère dans l'espoir qu'elle ne prononce pas les mots fatals. Il retient son souffle ignorant la pluie battante qui tape avec violence sur sa nuque refroidie. Mais pourquoi se figer de la sorte si c'est là la voie qu'elle choisit. Peut-être parce que le vampire ne craigne qu'elle s'éloigne. Quelle utopie, puisqu'après tout le trio d'Anges noirs en étaient déjà à leur septième année, il était évident qu'ils ne pouvaient continuer éternellement à suivre le même chemin. Il hoche alors la tête patiemment, son regard évite Autumn et fixe l'étendue de tombes branlantes. L'air déçu mais surtout froid, il attend, les larmes de sa vipère lui transpercent le coeur. Cent fois il aurait aimé accueillir sa douleur à sa place. Russel ferma les yeux l'espace d'une seconde, passant fébrilement une main dans ses cheveux. Elle. Qui plus que les autres, plus que lui encore a droit au bonheur. Mais tant qu'elle ne les abandonne pas. Les mots peinent à sortir, le Serpentard préféra éviter les yeux céruléens d'Autumn, tremblante.

« …Je l’aime… »

Un étrange sourire se dessina sur le visage de marbre de Russel. Il s'y attendait. Le Serpentard poussa un bref soupir et posa ses yeux d'ébène sur le ciel gris, quelques secondes. Elle était parvenue à dire le mot le plus sensiblement difficile à avouer, dessinant ses sentiments dans le creux de ses larmes ruisselantes. Russel se redressa et lui offrit un sourire qui paraissait étrangement forcé. Pourquoi donc cette déception. Il valait mieux Vanna Syl, que n'importe quel sang-de-bourbe à l'éthique risible. Aaron était estimé du Serpentard, son nom tout autant que le sien portant de belles promesses. Seulement Russel aurait souhaité la garder sous son aile, sans doute, la protégeant des bourrasques. Néanmoins il savait que derrière les airs froids et nébuleux de Vanna Syl battait tout entier un coeur au service de la douce Perkins. Un nouveau sourire, rassuré par ses propres pensées cette fois. Et sans doute que, bientôt il ne serait plus là, alors autant baisser sa garde pour la laisser enlacer son Chevalier.

Enfin il posa son regard sombre sur Autumn d'un air plus protecteur et rassurant. Russel n'avait jamais été d'une grande délicatesse lorsqu'il s'agissait des sentiments. Et pourtant en ce moment il estimait d'autant plus sa vipère qu'elle avait réussir à évoquer des mots que lui même ne parvenait pas à prononcer. Ses mains joignirent celles de son ange dans l'envie de stopper ses tremblements succints, se profilant par moment sur ses joues rosies afin de receuillir ses larmes qui ne cessaient de rouler, le regard semi-pensif. Il sentait sa fragilité faire frémir tout son être, il craignait de la voir se briser sous les affres de l'amour, trop cruel même pour des êtres comme eux.

R.~ Ca ne mérite pas des larmes, tu as droit au bonheur vipère.

Un murmure dans un souffle froid. Mais si elle se devait de goûter cette effluve sucrée, peut-être devrait-elle s'éloigner de lui. Le Serpentard ne pouvait amener que de sombres choses qui voileraient de trop son ciel ombrageux. Il resserra quelque peu ses doigts sur les mains froides d'Autumn, lui refusant de soumettre son choix de s'éloigner d'elle peut-être, pour la préserver. Ses yeux alors posés à terre, il sourit sans vraiment savoir pourquoi, sachant seulement qu'il se devait de la pousser d'avantage vers ce qui l'effrayait. Pour son bien.

R.~ Ne blâme pas Vanna Syl parce qu'il peut paraître froid. Parfois même l'être le plus glacial peut éprouver les désirs les plus ardents. Ne le laisse pas filer.

Etranges propos tenus en demi-teinte. Quelque part des paroles qui peut-être parlaient de lui, plus étrange encore était le fait qu'il en défendait un autre. Russel déposa un baiser sur le front de sa vipère, il ne parvenait pas à lui demander de ne pas lui tourner le dos, lui qui pensait l'éloigner quelque peu de lui. D'un geste lent le Serpentard ôta son manteau sombre et le posa sur les épaules frêles d'Autumn qui semblait si fragile qu'il craignait ne la voir plier sous le sifflement du vent. Je l'aime. Trop chaleureux pour son coeur froid. Rien que pour avoir eu cette audace courageuse de prononcer les mots qu‘il ne dira jamais, Russel ne pouvait que l‘estimer d‘avantage. Mais il n‘en dit rien, silencieux comme toujours. Combien de ses propres victimes avaient déjà éprouvé des sentiments pour lui, et combien de fois leur avait-il répondu dans un sourire froid et cruel que ce ne serait jamais réciproque. Aujourd’hui dans les yeux d’Autumn, il percevait d’avantage les affres de l’amour qu’il évitait. Il y avait cet autre moyen, de faire cesse ses larmes, celui de lui faire comprendre qu‘elle n‘était pas seule, dans ses faiblesses. Le Serpentard détourna ses yeux vers les sépultures que tous deux surplombaient.

R.~ Parfois je me dis que ce désir de le voir revenir tourne à l’obsession. C’est peut-être aussi pour cela qu’on m’évite.

Un sourire sombre sur ses lèvres, Russel parlait rarement de lui.

HRP : excuse-moi j'aime pas vraiment la réponse, mais j'ai pas réussi à faire mieux '^^

HRP - Naaaaah ! Dis pas ça ! C'est magnifique >.<'

Des tremblements. La jeune femme ne savait faire que ça. Trembler, défaillir, s’envoler, oublier. Puis tout recommencer. C’était un cercle infini qui, jour après jour, ne cessait de se répéter. Il était là, sans arrêt présent, prenant le contrôle entier de son âme et de ses moindres sentiments. Plusieurs fois, elle avait tenté d’en parler à quelqu’un. Mais chaque tentative qu’elle entreprenait était un échec monumental. La Fatalité, sûrement. Il n’y avait que ça qui la poussait à abandonner lâchement, comme ces pauvres êtres dépourvus de pouvoir magique. Oh oui, elle était lâche, répugnante, emplie de haine et possédait un cœur écorché. Il avait peine à battre, peine à ressentir le moindre sentiment, surtout quand il ne savait pas où il mettait les pieds. Ca le déstabilisait, ça la faisait tituber. La jeune femme avait prit une grande inspiration, tournant de l’œil. Ses jambes fléchissaient à nouveau, ce qui lui fit perdre l’équilibre à plusieurs reprises. Mais elle continuait, comme cette fille rigide et sans pitié qu’elle se disait être. Cette fille pleine d’ambition, et pleine d’orgueil aussi. Elle représentait la parfaite élève de Serpentard. Cette haine hasardeuse, cette façon d’être, cette fierté sans pareille. Tout y était, les moindres détails étaient peaufinés pour que tout le monde ait l’illusion qu’Autumn était quelqu’un de pourrit jusqu’à la moelle, tout comme son père, tout comme le reste du monde d’ailleurs. Ils étaient tous pourris, et c’était ça le plus amusant.

Oui, c’était drôle de les voir s’acharner contre une colère qu’ils avaient déjà refoulée.

Ces gens, ce reste, tous les maudits, tous les gens honorables. Les bons, les mauvais. Eux, comme Autumn, avaient en eux une haine qu’ils avaient le choix de laisser paraître ou non. Voilà ce qui les différencier. Ils avaient le choix entre être des pions, ou être les maîtres. Belle Autumn, cette Reine cachée sous sa couronne avait choisit de vivre selon ses propres règles, puisqu’il n’y avait aucun moyen pour les changer. Elle avait décidé d’haïr la Terre entière pour avoir souffert toute sa vie, elle avait décidé de devenir quelqu’un de mauvais pour ce qu’on lui avait arraché ; son bonheur, sa stabilité, ses souvenirs majestueux. La reine, cette ancienne Princesse de son propre monde merveilleux, était devenue une fille détestable. Cet ange aux ailes brûlées par le temps ne voulait qu’une chose : ne plus souffrir. Milles fois, elle avait essayé de ne plus rien ressentir. Milles fois encore, elle avait tenté de ne plus se mentir, puis ensuite de passer à autre chose, de se jouer des autres. Ca avait marché, jusqu’à présent. Ca avait fonctionné jusqu’à ce qu’il arrive, jusqu’à ce qu’il mette les pieds dans sa vie, dans son espace vitale. Il était là, et la voilà démunie, dépouillée de son masque. Il avait piétiné son cœur, l’avait prit en otage et puis maintenant, elle souffrait à nouveau. Comme quelques années auparavant, dans une chambre sombre, dans une chambre qui empestait la mort.

Peut être qu’elle souffrait le martyr. Oui, peut être bien.

Il était là, l’Ange noir, le vampire de ces dames. Elle l’avait pour elle durant tout ce rendez-vous, et comptait bien en profiter. N’avait-il pas été son confident, et ce depuis la nuit des temps ? Si, bien sûr que si ! Alors pourquoi tant d’hésitation ? Pour rien, non, évidement. Pour rien. Elle s’approcha à petit pas de son deuxième ange gardien, car à cet instant là, il ne manquait plus que Nyla. Le trio, le fameux trio qui inondait Poudlard d’une envie massacrante de vengeance. Oui, elle s’approchait, affichant un sourire perdu sous des flots de larmes. Elle n’avait pas le droit d’avoir peur, ni même le droit de se décourager. Avec le temps, Autumn avait su se construire une armure qui pouvait supporter n’importe quoi, et à tout moment. Même avec ça sur le dos, elle avait encore mal. Mal de ça, mal de tout. Mal de croire au bonheur, de le voir n’importe où, n’importe quand, sans avoir la force de le prendre tout entier. A chaque fois, elle n’en prenait qu’une petite parcelle, si minuscule qu’à sa perte, elle n’éprouvait rien. Pas de remord, ni même de nostalgie. Son cœur devenait pierre, roche indestructible. Mais au fond, elle souffrait, souffrait à en mourir. Ca revenait sans cesse. Elle avait de nouveau mal. Mal de lui.

« …Je l’aime… »

A nouveau, elle se sentit fusillée, prise la main dans le sac comme une vulgaire fugitive. La jeune vert et argent ferma les yeux, cachant ainsi ses prunelles bleues océaniques. Elle sentit les mains de Russel prendre les siennes, ressentit à nouveau le frisson du contact qui lui manquait tant. Oui, ce contact qui lui prouvait à nouveau qu’elle était en vie, qu’elle était bel et bien présente et réelle. Autumn se sentit pousser des ailes, décollant lentement ses pieds du sol pour rejoindre le Paradis. Avait-elle le droit à cette fin là ? Ce jardin d’Eden, cet endroit si magnifique qu’on décrit dans des milliers de livres ? Non, peut être bien que non. Et puis, elle s’en fichait. Son Paradis était sur Terre, à ses côtés, à leurs côtés. Elle allait finir par s’y faire, à la longue. Un dernier sourire, et tout en se rapprochant du jeune Serpentard, elle lui accorda un regard des plus flamboyants. Ici, à cet instant précis, elle avait la preuve qu’il était auprès d’elle, qu’il allait la soutenir jusqu’au bout.

« Ca ne mérite pas des larmes, tu as droit au bonheur vipère. »

« J’en ai peur, Russel… J’ai peur du bonheur, et surtout peur de le perdre. »

Peur de le perdre. Cette phrase résonnait dans sa tête comme un tambour, s’aventurant dans les moindres recoins de son crâne. Elle restait là, devant lui, tétanisée. Sa seule envie était de se perdre dans les bras de son cher vampire, mais elle refoula ses pulsions, se contentant ainsi d’un sourire et de quelques larmes. On ne saurait dire pourquoi, mais elle était émue. Après une légère hésitation, elle se remit en marche, entraînant Russel dans sa course. L’aventure. Intrépide, mystérieuse, particulière. Elle s’était mise à courir, ses yeux bleus pleins de rêves. Oui, elle rêvait éveillée, incapable de revenir à la réalité, complètement abandonné dans son Paradis. Mais lui, il était là. A ses côtés. Toujours.

« Ne blâme pas Vanna Syl parce qu'il peut paraître froid. Parfois même l'être le plus glacial peut éprouver les désirs les plus ardents. Ne le laisse pas filer. »

« Jamais je ne le laisserais filer, tu en as ma parole. Il est trop… Hey ! L’être le plus glacial… Tu ne parles pas de toi, par hasard ? Oh mon Russel…Que caches-tu derrière ton sourire plein de sarcasme ? Avoue tout à ta Autumn, je meurs d’envie de savoir ce qu’il se passe… »

Un léger sourire, qui se transforma très vite en fou rire. Elle s’arrêta, se plantant devant son Serpentard préféré, yeux dans les yeux. Ainsi, elle essayait de le faire parler ? Non, Autumn. Russel était du genre silencieux, même s’il se passait quelque chose, il ne te le dirait pas. Oh, vraiment ? Elle déposa un baiser sur sa joue droite, un sourire toujours timide accroché à ses fines lèvres. Petit Ange redescend de son nuage, tout à coup. La pluie est rude, ici. Elle s’écrase sur nos corps frêles, nous fait mourir de froid, mourir de chagrin. Elle s’éparpille partout, détruisant tout sur son passage. Avait-elle tord de croire que sa réalité n’était pas bonne à voir ? Elle la refusait, elle voulait l’oublier le temps d’une sortie, le temps de ce rendez-vous si particulier. Elle ne désirait que ça ; être avec lui, rire avec lui, parler avec lui, puis tout oublier. Alors qu’elle s’apprêtait à fermer les yeux, elle sentit le jeune Mustang lui mettre quelque chose sur les épaules. Son manteau. Alors Autumn était faible ? A tel point qu’elle ne pouvait pas supporter la pluie et ses atrocités ? Certainement, mais elle n’y prêta pas attention. C’était différent, avec lui. Un signe de la tête en guise de merci, accompagné par un sourire chaleureux, puis elle entendit à nouveau sa voix.

« Parfois je me dis que ce désir de le voir revenir tourne à l’obsession. C’est peut-être aussi pour cela qu’on m’évite. »

« Certainement… Il reviendra, j’en suis persuadée. Mais il faut être patient, tu le sais tout comme moi. Pour l’instant, le plus important, c’est que tu finisses tes études avec brio. »

Un sourire amical, presque amusé, et la jeune vert et argent reprit la main de son ami, la serrant comme ci sa vie en dépendait. Elle resta ainsi quelques secondes, le contemplant comme elle l’avait toujours fait. Puis, enfin, elle le rassura, posant son autre main sur sa joue froide. Elle la laissa glisser quelques instants, jusqu’à la retirer et souffler sur ses mèches brunes. Oui, personne ne pouvait comprendre Autumn. Même elle n’y arrivait pas, en fait.

« Les gens qui t’évitent sont des idiots, des crétins. Ils ne savent pas ce qu’ils ratent en jouant les faux égoïstes. Tu es quelqu’un d’exceptionnel, même sous tes airs froids… »

Smile. Just Smile !

Quel imbécile avait dit qu'il était facile et lâche de cadenasser ses sentiments et de se montrer froid. Pour un pouvoir, pour un empire, pour un poids tel que celui-ci sur les épaules, il lui était impossible de dévoiler ses peurs et ses faiblesses. En outre le Serpentard outrecuidant restait persuadé qu'il n'était pas de cette espèce, poussant même le vice jusqu'à convaincre involontairement ses camarades qu'aucune crainte ne venait habiter son coeur trop étroit. Et pourtant. L'une de ses failles se tenait justement devant lui. Radieuse dans tout son trouble. Plus encore sa vipère souriait, et elle ignorait que ses sourires, aussi tristes pouvaient-ils être, nourrissait l'âme de Russel d'une gaieté qu'il se refusait. De sombres pensées, de sombres paroles, de sombres regards, et de sombres sourires. Une froideur apparente qui ne venait que confirmer ce qui l'habitait intérieurement, le bourreau de son propre coeur et de tous les autres. S'il en avait envie. Il avançait de ses propres règles, soumettant ses victimes à son arbitrage aléatoire et bien souvent cruel, avançant ses pions sur un échiquier. Juste comme elle. Russel ne suivait pas le règlement de ce monde, il le haïssait jusqu'à la mœlle, à en faire brûler des flammes dans ses yeux noirs, parfois.

Mais elle. Elle avait décidé d'aimer. Avec des larmes, avec la peur accrochée à son ombre, avec l'hésitation des premiers pas, mais elle en avait décidé ainsi. Peu importait. Elle n'était pas du commun des mortels, tout comme lui, tout comme Nyla. Aussi l'amour, plutôt que de l'entrainer dans sa chute lente et ternir sa beauté, la sublimerait d'avantage. Ainsi en était la volonté de Russel, quoiqu'il en soit. Puis elle riait. Cela n'arracha qu'un sourire au Serpentard, mais il valait bien tous les éclats de rire du monde, tant cette fois il semblait réellement amusé. Et non éclairé d'une lueur macabre, ce n'était ni un rictus sombre, ni le sourire de celui qui jouait les hypocrites, juste une esquisse répondant à la bonne humeur de sa vipère. La pluie se faisait moins dense, les nuages grisâtres poursuivaient leurs courses dans le ciel sombre, dévoilant quelques rayons de soleil. Elle avait éveillé l'astre solaire qui était venu réchauffer ses joues, malgré la pluie toujours présente.

« Jamais je ne le laisserais filer, tu en as ma parole. Il est trop… Hey ! L’être le plus glacial… Tu ne parles pas de toi, par hasard ? Oh mon Russel…Que caches-tu derrière ton sourire plein de sarcasme ? Avoue tout à ta Autumn, je meurs d’envie de savoir ce qu’il se passe… »

R.~ Rien...

Un sourire amusé de nouveau, dévoilant ses canines, il reporta ses yeux sur l'horizon gris. Il était rare que l'on entende parler de lui même. De ses ambitions, de ses pensées noires, mais jamais de ce qui éveillait son palpitant. Il préférait intérioriser et laisser parler les autres, c'était ainsi qu'il dressait sa fierté, dans un étendard emprunt de mystère trop dense que peu de personnes parvenaient à percer. Pour Russel il était simple d'en deviner la cause, le Serpentard s'amusait à tirer les ficelles de ses poupées dansantes pour lui et s'évertuait à se rendre maître de la manipulation au possible, aussi parler de lui ne serait-ce qu'un peu trop, serait la clé de ses victimes pour déjouer ses jeux cruels. Et c'était un joueur averti qui nécessitait un sang froid absolu. Mais un aveu de ses lèvres échappé volontairement poussa à faire comprendre à Autumn qu'elle faisait partie de ceux à qui il pouvait se confier. Dans les limites mises en place par ses soins.

R.~ Parfois je me dis que ce désir de le voir revenir tourne à l’obsession. C’est peut-être aussi pour cela qu’on m’évite.

« Certainement… Il reviendra, j’en suis persuadée. Mais il faut être patient, tu le sais tout comme moi. Pour l’instant, le plus important, c’est que tu finisses tes études avec brio. »

Il hocha la tête d'un air convaincu. Mais il ne l'était pas. Ses études, pour autant qu'il parvienne à les finir, il n'était pas certain qu'elles lui servent à quelque chose. Russel avait toujours vu sa vie étrangement courte, sans pour autant le craindre. Le Serpentard gardait cette conviction pour lui, espérant bien sûr qu'il était dans le faux. Il voulait vivre longtemps, au moins assez pour voir ces temps sombres revenir. Parce que c'était son père, parce que c'était ses idéaux, parce qu'il était temps de faire payer ses péchés au monde entier. Ils feraient revenir l'Enfer sur ce monde, quoiqu'il arrive.

« Les gens qui t’évitent sont des idiots, des crétins. Ils ne savent pas ce qu’ils ratent en jouant les faux égoïstes. Tu es quelqu’un d’exceptionnel, même sous tes airs froids… »

R.~ Tous les gens qui ne sont pas de notre espèce sont des crétins, Autumn.

La douce Perkins ne connaissait bien sûr que le protecteur, pour rien au monde Russel ne lui aurait fait du mal. Du moins pas volontairement. Il était évident, que ses victimes et ses ennemis pensaient bien pire à son sujet, mais cela le faisait sourire. Il aimait être ce Serpentard agaçant et arrogant. Ainsi, peut-être était-il exceptionnel à ses yeux, mais la réalité était toute autre. Soit, au moins il était estimé de son ange. Peu décidé à parler de lui, il porta son regard noir sur sa vipère. Frêle dans son sourire, elle avait cette chose en plus, qui la rendait si fragile mais si estimée à ses yeux. Une alliée de poids, une amie précieuse, un rayon de soleil pour le Serpentard. Elle ne méritait pas cette guerre intérieure, Nyla et Russel lui tendraient la main, afin de la isser à leurs côtés, la protégeant de ces autres trop impurs pour son être. Mais il ne pouvaient la protéger de l'amour.

R.~ On veillera sur toi.

Nul besoin d'en dire plus. Sa voix bien trop froide pour des paroles chaleureuses, Russel était pourtant foncièrement sincère. Ses mains dans les siennes lui faisait comprendre qu'elle serait là, toujours, et que son devoir avant tout était de veiller sur elle, pas de s'en éloigner. Décision prise.

Les mots, toujours les mots. Elle les confond, la jeune vert et argent. S’emmêle, suffoque, agonise. Tant de choses pour de simples paroles, des paroles qui ne valent rien. Pas même un sourire, ni même un regard. Elle était là, devant lui, incapable de lui crier son amour. Un amour fraternel, d’ange à ange, de démon à démon. Ils étaient identiques, avaient choisis la même voie. Celle de l’atrocité, de la souffrance, de l’égocentrisme et du vice. Faire souffrir, encore et encore, pour la puissance et la renommée. Souffrir à son tour, puis vint le moment où ils devront tuer pour vivre, pour survivre. Autumn avait mal, son estomac était tout retourné rien qu’à cette pensée. Survivre. Comme des milliers d’êtres humains sur Terre, comme des moutons, des chiens errants qui se déchaînent et s’entretuent pour réussir à vivre. C’était un éternel combat qu’ils entamaient, et ce combat ne résistait que très rarement au lien du cœur, aux promesses de fidélité. Autumn l’avait suivit, lui, le vampire qu’elle avait toujours estimé. Suivre Nyla aussi, cet ange démoniaque qui était sa jumelle. C’était par un seul regard qu’elle avait prêté serment, ne désirant être qu’avec eux depuis son arrivée dans ce monde étrange. Elle avait battit son armure, s’était forgé un caractère adapté. Grâce à eux, à ces anges perdus, elle avait réussit à survivre, à trouver la solution pour demeurer forte. Mais il était arrivé, lui, le preux Chevalier. Et son regard couleur océan l’avait fait chavirer, elle faisait naufrage. La poupée de cire avait essayé de se contrôler, mais son cœur s’était remit à battre. Doucement, lentement. Comme ci la machine se remettait en route ; elle souffrait, elle avait mal. Et tout ça, elle le faisait pour lui. Non, elle ne rêvait pas d’un Chevalier, mais elle le voulait comme Prince. Et ce, à tout jamais.

Russel savait tout ça, il le lisait dans ses yeux couleur pastel. Il avait toujours su trouver les mots, aussi silencieux et inaudibles soient-ils. Chacun de ses sourires sincères étaient comme des poèmes qu’on semait tranquillement. Tout ça marchait comme une prophétie. Autumn, la petite fille audacieuse, mais fragile, rencontre l’amour dans les bras d’un gentil jeune homme. Elle quitte sa raison pour retrouver son cœur, et se sent à nouveau pousser des ailes. Adieu ange déchu, bonjour cadeau du ciel. N’était-ce pas miraculeux ? Si, bien sûr. C’était digne des plus beaux contes de fées. Mais non ! Ils étaient là, ils comptaient sur elle. Elle ne pouvait partir, ni même risquer de s’éloigner sous le simple prétexte que son cœur bat à nouveau, et pour quelqu’un. Bien sûr, il en valait la peine. Bien sûr encore, il méritait beaucoup plus qu’une Autumn prête à tout pour réussir. Il ne méritait pas ce démon, cette esquisse macabre d’une petite poupée de cire, une poupée fragile en apparence, mais qui est tout aussi différente à l’intérieur. Un cœur qui bat, des larmes versées, tout ça mérite plus que des belles paroles et des promesses hypocrites. Il fallait qu’elle change, sans pour autant s’éloigner d’eux, sans pour autant perdre de vue son but principal. Dans ses songes se cachait une part de consolation ; elle avait tout pour être heureuse. Elle venait d’entrevoir le bonheur, même lointain, et essayait désespérément d’en attraper une infime partie. Elle avait trop peur. Peur de les blesser, de le perdre, peur de tout quitter. C’était atroce, à tel point qu’elle dû se battre contre son subconscient pour ne plus y repenser. Il était là, devant elle. Autant en profiter.

« Jamais je ne le laisserais filer, tu en as ma parole. Il est trop… Hey ! L’être le plus glacial… Tu ne parles pas de toi, par hasard ? Oh mon Russel…Que caches-tu derrière ton sourire plein de sarcasme ? Avoue tout à ta Autumn, je meurs d’envie de savoir ce qu’il se passe… »

« Rien.. »

Elle esquissa un sourire, un sourire digne de la petite poupée qu’elle représentait. Une enfant innocente, qui renaît de ses cendres, de ses démons les plus profonds. Elle s’empêcha de rétorquer, et préféra de loin lui prendre la main et avancer à ses côtés. Comme dans la vie. Au fond, elle espérait qu’il reste près d’elle toute une éternité ; il était son éternel confident, un confident fantôme qui lisait en elle comme dans un livre. Il était son guide parmis cette foule de dépravés, celui qui la comprenait mieux que personne. Pas un simple Serpentard, non. LE Serpentard.

« Tu sais que tu peux me parler, Russel… J’serais toujours là pour toi, autant que tu l’es pour moi. »

Elle a mal, très mal. Elle pousse un cri, un cri qu’on n’entend qu’à l’intérieur. Un cri de désespoir, hurlant, pestant contre ce que le monde avait fait d’elle, ce qu’il avait fait d’eux. Elle haïssait ça au plus haut point ; être faible, lâche. Elle s’était brûlée les ailes depuis bien longtemps, alors pourquoi espérer à nouveau ? C’était abjecte, et dépourvut de sens. Un dernier soupir, et elle arrêta sa marche, se plaçant juste en face de son ange. Son regard se planta immédiatement dans celui du jeune Mustang. Elle cherchait, encore et encore, ne désespérer jamais. Peut être qu’un jour, il allait se confier. Qui sait…Une chose est sûre, c’est qu’elle sera toujours près de lui, à ses côtés. Quoi qu’il advienne, où qu’il aille.

« Les gens qui t’évitent sont des idiots, des crétins. Ils ne savent pas ce qu’ils ratent en jouant les faux égoïstes. Tu es quelqu’un d’exceptionnel, même sous tes airs froids… »

« Tous les gens qui ne sont pas de notre espèce sont des crétins, Autumn. »

A nouveau un sourire, plus provocateur, plus moqueur. Elle tourna les talons, tournoyant sur elle-même, pointant les environs du doigt avec une ambition poussée à l’extrême. La provocation, encore et encore. Les arbres, les tombes, le ciel. Tout y passait. Autumn, poupée déboussolée, s’était mise à rire. Pas le rire innocent, non, loin de là. Un rire sarcastique, provocateur, celui qu’elle n’avait pas émit depuis bien longtemps. Un doux mélange de mépris et de douceur, d’ironie et de réalisme. La jeune fille s’arrêta, contemplant à présent son cher interlocuteur. Elle le regardait, ses prunelles océaniques demeurant plus sombres encore. Un. Deux. Elle s’élança avant le trois.

« Alors regarde, vampire… Nous sommes entourés de crétins. Des imbéciles, des sots. La vie elle-même est une imbécile, une traînée… Tu vois, ne désespérons pas. Ils nous remercierons un jour de leur avoir montré ce qu’apportait la puissance dans ce monde de dépravés. Tu verras, Russel. On les aura, tous autant qu’ils sont… »

Et puis, là ? Elle devra combattre le bien, combattre ce qui est à l’opposé de son idéologie. Douce utopie. Ca n’était pas si simple, en vérité. Il ne suffisait pas seulement d’un coup de baguette pour tout changer, ni même d’un coup de poing bien placé. Il fallait plus, beaucoup plus qu’une idée. Du concret. Il n’y avait que ça qui comptait. Une ère nouvelle viendra, au détour d’un cimetière. Même s’il fallait attendre patiemment, Autumn sera présente, ce jour là. Elle sera à leurs côtés comme elle l’avait juré. Une fidèle parmis les fidèles, une Princesse parmis les Reines. Petite fille à l’enfance volée et au cœur arrachée ; voilà ce qu’elle était, et voilà ce qu’elle sera. Pour eux, simplement pour eux, elle décrocherait la Lune, même s’il fallait qu’elle s’y perde en chemin. C’était un tout, un tout qui les unissait. Ils formaient un trio éternel, un trio remplit d’une haine et d’une soif de vengeance effroyable. Trois caractères différents, trois personnes différentes. Mais pourtant un seul amour, un seul désir.

« On veillera sur toi. »

« C’est une promesse que tu me fais là ? Tu sais bien que je les déteste… Elles sont souvent là pour nous décevoir, pour nous frapper en plein cœur. Je suis morte à cause de l’une d’entre elles. »

Une carcasse, elle n’était qu’une simple carcasse, une coquille vide, un fantôme oublié.

Je serai toujours là pour toi, autant que tu l'es pour moi. Un silence rendu pour des paroles trop belles, mais un sourire malgré tout. Un "merci", semble-t-il, lui aurait écorché la gorge, et pourtant il n'en pensait pas moins. Les paroles de Russel ne valaient jamais un de ses regards, tant ils étaient explicites, et celui qu'il posa sur sa vipère ne pouvait que lui exprimer toute la gratitude et ce sentiment fraternel qu'il pouvait avoir pour elle. Alors, ils seront là l'un pour l'autre pour toujours. C'est là une promesse, princesse, ne renie jamais tes paroles, elles sont la certitude que tu existes, et qu'à travers ces mots nous nous faisons serment de marcher dans la même direction. Alors il hocha la tête, et de son sourire sombre il en fit une réponse muette mais bienveillante. S'il avait cette chose qu'il n'avait pas... Cette petite faiblesse que parfois il leur enviait tant, malgré tout. S'il avait pu la prendre dans ses bras, poser sa tête brune contre son buste et lui sommer de fermer les yeux, le temps seulement d'être un peu moins froid, et de dire ces mots qui ne venaient pas. Trop froid encore pour montrer cette faiblesse, même pour ces gens qu'il aimait, ils étaient les seuls à savoir que sa froideur et sa colère étaient parfois l'expression de ses meilleurs sentiments. Soit, donc se montrerait-il impulsif face à sa vipère, pour lui faire comprendre ?

Oui, bien sûr qu'il pouvait lui parler, seulement il ne souhaitait pas l'embarquer dans son sillage. Ses péchés ne devaient pas être rachetés par ses proches, ce qu'il avait fait, il l'avait exécuté sans remord aucun, fier et droit, sans que jamais ce meurtre ne vienne hanter son esprit. Il était seulement à présent conscient que ses mains si blanches seraient finalement à jamais souillées, et ce n'était là qu'un commencement. Ce n'était qu'un crime, un petit crime, bien qu'il n'avait pas d'excuse. Et elle, cette poupée frêle et dansante, si fragile, si fragile. Mais dans le fond, était-il possible que la petite fille de porcelaine ne se renferme sur elle que parce qu'on ne l'exposait pas assez à la lumière du jour, elle et son teint de lait ? Serait-elle plus forte s'il la prenait sous son aile, faisant de sa vipère une complice de plus ? Elle était des leurs, elle devait savoir. Russel poussa un bref soupir, et baissa les yeux à terre lorsque sa vipère se mit à rire. Ô miracle, le Serpentard ne trouvait mot, ne soutenait plus cette princesse trop blanche du regard, qui semblait vouloir compter une à une ces sépultures de pierre.

« Alors regarde, vampire… Nous sommes entourés de crétins. Des imbéciles, des sots. La vie elle-même est une imbécile, une traînée… Tu vois, ne désespérons pas. Ils nous remercierons un jour de leur avoir montré ce qu’apportait la puissance dans ce monde de dépravés. Tu verras, Russel. On les aura, tous autant qu’ils sont… »

R.~ On les aura. Et la vie avec. On les aura tous, bien avant de nous faire avoir.

De la haine, de la colère contre tous. Ils étaient simplement paumés. Qu'on vienne les chercher, tous les trois. Qu'on vienne les chercher, qu'on les laisse tranquille, qu'on les arrache de ces terres pour les envoyer ailleurs, là bas où la vie recommence. De la peur, muée en une haine féroce. Puisqu'on ne les aiderait pas, puisque ces autres s'en foutaient, alors ils paieraient tous. Bande d'ignares qui passent leur temps à sous-estimer cette colère, trop occupés à regarder leur propre nombril pour voir ce monde qui tourne autour. Leurs promesses à eux, elles n'étaient pas faite de belles paroles, elles étaient faites d'un serment tout entier qui n'appartenait qu'à eux.

« C’est une promesse que tu me fais là ? Tu sais bien que je les déteste… Elles sont souvent là pour nous décevoir, pour nous frapper en plein cœur. Je suis morte à cause de l’une d’entre elles. »

Russel s'avança d'un pas vif, ses yeux allumés d'une flamme vacillante. Ah la voilà, la bête qui s'éveillait. Ne comprenait-elle pas, vraiment ? Ses mains attrapèrent celles de sa vipère, brusquement. Son regard dans lequel planait une ombre assassine fixaient les prunelles de la douce Perkins, et l'on pouvait lire dores et déjà sur le visage froid du Serpentard qu'il ne prenait que trop au sérieux, sa promesse.

R.~ Les promesses que je fais ne sont jamais des mensonges. Une parole que je te donne est toujours un serment à mes yeux, souviens-t'en.

Et la pluie se fit moins dense, le soleil perçait les nuages, l'air s'asséchait. Plus une goutte d'eau, seulement se vent balayant doucement les lieux. Le silence encore, le Serpentard lâcha enfin ses mains. Russel semblait hésiter de nouveau, mais elle devait savoir.

R. ~ Autumn... J'ai fait pas mal de conneries déjà mais celle-là je n'ai jamais eu de remords. Cette nuit-là, au deuxième étage, souviens-toi...

...De ce tremblement qui souleva l'école. Le cadavre de Malacci, c'était lui. Il n'alla pas plus loin, elle comprenait déjà sans qu'il ne continue. Ses yeux sombres se posèrent sur Autumn, se tenant prêt, juste au cas où... Celui où, si l'envie lui en prenait, elle fuirait. Ou au contraire, si elle se mettait à pleurer, à crier, à se jeter dans ses bras. Il se tenait prêt, enfin, à accueillir ses sentiments.

« On les aura. Et la vie avec. On les aura tous, bien avant de nous faire avoir. »

N’était-ce pas déjà fait, au fond ? Se faire avoir. C’était tellement complexe, quand on y réfléchissait de plus près. Parlait-il de la mort, ou de ces gens qui, par des idées différentes, se voient obligés de combattre ce qu’ils appellent le « mal » ? Le mal. Elle en émit un petit rire nerveux, ressemblant plus au rictus grotesque. La vie l’avait déjà eut, elle. Autumn n’était plus vivante, plus assez pour vivre correctement, plus assez non plus pour se battre jusqu’au bout, jusqu’à la fin. Elle divaguait, comme un bateau en plein naufrage qui tente tant bien que mal de revenir. Mais elle n’y arrivait plus. Par amour pour eux, pour ces Anges que le ciel avait gentiment mit sur sa route, elle faisait semblant d’être heureuse, de sourire. N’était-ce pas un appel à l’aide, au fond ? Elle aurait bien hurlé tout son chagrin, tout en pleurant comme jamais elle n’avait pleuré. Mais c’était impossible. Russel n’avait pas le temps de s’occuper de ses problèmes, et si elle devait lui en parler, elle serait obligée de tout lui dire. Le passé, ce qui l’angoisse, toutes ses peurs qui s’emboîtent une à une pour ne former plus qu’un amas de problèmes à la fois futiles mais douloureux. Ca faisait trop mal de parler de toutes ces choses, et puis, si elle le disait, il saurait qu’Autumn n’était qu’une fille faible, une fille fragile. C’était seulement des apparences. Elle avait le droit d’y croire, non ? Autumn était loin d’être une petite idiote complètement inconsciente de ce qui l’entourait. Elle faisait semblant pour ne pas voir la vérité en face, pour tout oublier. Se dire que la réalité n’a jamais de limite, et que le rêve vaut milles fois plus le coup d’être vécut. Foutaises, il fallait qu’elle lui en parle. Après tout, qu’est ce que ça allait changer ? Rien. Enfin, presque…

Oh, et puis, Russel devait se douter qu’Autumn n’avait pas eut une enfance facile. Ils savaient certainement pour sa mère et sa petite sœur, mais en ce qui concernait son père et ses actes ignobles, elle n’avait rien dit, et ce, à personne. Parler de lui réveillait les mauvais démons, et elle avait du mal à s’en remettre, après ça. Oui, elle était lâche. C’était plus simple de prendre une issue de secours plutôt que de devoir affronter la réalité en face ; tout dire aurait été la pire des tortures, un supplice effroyable. Elle n’avait plus assez de force pour trouver les mots, ceux qui lui auraient permit de s’en sortir. Mais, après ça, ce n’était pas la seule chose qui la préoccupait. Il y avait des tas d’autres raisons qui la poussaient à être aussi épuisée, aussi perdue. Elle voyait bien que tout allait de travers en ce moment, autant pour elle que pour ses deux Serpentards préférés. C’était ça qui la poussait à en savoir plus, s’occupant beaucoup plus des autres que d’elle-même. Elle avait fait la même chose avec Stewart, c’était la seule échappatoire possible pour oublier un instant Aaron et tout ce qui s’était passé. Les mots de Russel revenaient sans cesse dans son esprit ; elle s’était figée, le regard vide de tout sentiment, fixant un point presque invisible. Elle sentait son cœur battre de moins en moins vite, ses mains tremblant comme jamais. On les aura, la vie avec. La vie. Sans cesse on en revenait au même point ; la vie. Un rêve éphémère parmis tant d’autres, mais à la différence de tout le reste, celui-ci était plus…Réel. Elle cherche à lutter, ne pas tomber au sol. Les mots sont là, mais elle n’arrive toujours pas à les prononcer. Elle perd pied lentement, comme une âme qu’on tue petit à petit, qu’on pousse jusqu’à l’agonie. Oui, c’est ça ; elle agonisait.

« J’espère, Russel…J’espère… »

Elle ferme à nouveau les yeux, sa voix se faisant de plus en plus fébrile. Elle-même l’était. Son corps tout entier tremblait, frémissant à chaque fois que la brise légère venait en contact avec sa peau. Elle ressemblait d’autant plus à cette poupée de cire. Son regard pâle caché par la détresse, et ces joues au teint laiteux, propre aux poupées d’enfant. Il ne lui manquait plus que cette grâce naturelle pour n’être qu’une copie de ces jouets d’enfant, qu’on se passe à tour de rôle et qu’on finit par briser. A-t-on déjà ressentit le moindre remord en détruisant une de ces poupée douces et rêveuses ? Non, jamais. Elle n’était rien d’autre que des objets, objets de luxe, certes, mais objets tout de même. Autumn, à la différence d’elles, avait un cœur quelque part enfouit dans sa poitrine. Un cœur détérioré, tout comme elle. Les autres l’avaient détruis, avec leurs promesses et leurs illusions. Elle était morte, prête à être enterrée. Seulement voilà : ils étaient là. Un maintient de plus pour la tenir en vie. Désespérant. « On veillera sur toi ». Qu’est ce qu’il entendait par là ? Etait-elle faible au point de devoir compter sur quelqu’un pour survivre ? Elle était dépendante. C’était une vérité atroce à prendre en compte, et il lui fallut plusieurs secondes avant de réagir, ouvrant peu à peu les yeux. Elle fut éblouit par le mince soleil, mais ne grogna pas.

« C’est une promesse que tu me fais là ? Tu sais bien que je les déteste… Elles sont souvent là pour nous décevoir, pour nous frapper en plein cœur. Je suis morte à cause de l’une d’entre elles. »

« Les promesses que je fais ne sont jamais des mensonges. Une parole que je te donne est toujours un serment à mes yeux, souviens-t'en. »

« J’ai confiance…Plus que tu ne peux le croire. »

Ses mains se serraient d’avantage sur celles de son vampire, comme pour l’empêcher de partir. Il n’avait pas le droit, après tout. Elle avait d’énormes sacrifices pour lui, était prête à mourir pour le soutenir. Il n’avait pas le droit de s’envoler, ni même le droit de la laisser plantée là, sans rien dire, avec pour seul remerciement un sourire carnassier dont il était le seul à détenir le secret. Soudain, il lâche sa main. Elle le contempla quelques secondes, jusqu’à baisser la tête. S’il hésitait ainsi à prendre la parole, c’est que le sujet devait être important. Assez pour qu’elle en eut mal à la tête, en tout cas.

« Autumn... J'ai fait pas mal de conneries déjà mais celle-là je n'ai jamais eu de remords. Cette nuit-là, au deuxième étage, souviens-toi... »

Elle ne fut pas surprise, et savait pertinemment de quoi Russel voulait parler. Les rumeurs sur le meurtre du Professeur Malacci n’avaient faits que s’amplifier durant la semaine, accusant à tord et à travers. Almadovar, en premier lieu. Elle avait fait semblant de faire l’aveugle, mais savait très bien que Malacci avait causé la perte d’Heinrish Mustang. Sans dire quoi que ce soit, la jeune vert et argent s’avança à petit pas vers le jeune Serpentard, le fixant d’un regard à la fois doux et compatissant.

« Malacci…C’était donc toi, pas vrai ? Je le savais… Nyla le sait au moins ? »

Elle s’arrête, puis, brusquement, respire un bon coup. Elle prend sa main, le tirant vers elle, les yeux presque humides. Elle n’allait pas pleurer, seulement lui dire ce qu’elle ressentait.

« Je suis là, Russel. Quoi qu’il arrive, je te soutiens ; quitte à devoir tuer, à devoir donner ma propre vie. Tu sais ce que je pense de tout ça. Je serais là pour toi, je ne t’abandonnerais pas. Quelqu’en soit le prix. »

Un sourire. Elle finit quand même par tomber dans ses bras, une fois de plus.

Qu'y avait-il dans ces yeux ternes pour qu'ils brillent ainsi d'une étrange façon ? Premier échec, Russel ne semblait rien y déceler. Lui qui à son habitude savait si bien sonder l'âme de ses interlocuteurs, voilà que face à sa vipère il n'y parvenait pas. Trop complexe peut-être, ou trop... floue ? Des sentiments qu'il ne parvenait pas à capter, sans doute parce qu'elle tentait de les cacher sous des sourires, des mots, ou en déviant de la conversation. Mais son regard. Son regard. Une fausse nostalgie, une pointe de remords, mais quelque chose encore que Russel ne parvenait pas à capter. Il aurait été facile de lui poser directement la question, mais plus ardu d'y répondre pour sa petite vipère qui pouvait à tout moment se noyer dans ses sentiments trop confus. Le sourire du Serpentard avait disparu, malgré ceux que lui offrait la douce Perkins, il ne semblait plus vouloir se prendre au jeu du voile que l'on dépose sur le visage pour faire semblant et jouer les artistes. Bien sûr, qu'ils en étaient. A se jouer des autres et à se défier eux même, y avait-il vraiment des êtres qui pouvaient prétendre se trouver au-dessus d'eux ? Mais aujourd'hui le petit Prince noir désirait soulever ce masque satiné, et découvrir la véritable facette de la Princesse qui ne vivait véritablement pas son conte de fée.

En outre était-il certain que le bonheur existait vraiment ici-bas ? Russel ne s'était jamais posé la question, se contentant de suivre ses ambitions et de poser son emprunte sur le monde de la magie noire. Il aimait ce contrôle qu'il pouvait avoir, celui de se jouer des autres et de leurs vies, de manier ses marionettes comme il le souhaitait, les poussant au ravin ou au contraire les laisser agoniser. Qu'il était jouissif de pouvoir étreindre la vie de l'autre entre ses doigts. Mais en ce moment-même, c'était sa vipère qui agonisait. Que faire donc lorsqu'un être aimé se sentait ainsi perdu. Mustang junior n'avait pas la réponse, bien trop souvent pris dans ses propres desseins, se jouant de la douleur des autres, il en oubliait celle de ses proches, à les faire souffrir parfois. Russel avait donc conscience du mal qu'il pouvait leur faire, sans le vouloir. Visiblement il n'apportait que le chaos autour de lui. A trop vouloir taire ses sentiments il semblait passer pour un vampire bien trop glacial et égoïste. Il y avait en outre une part de vérité. Il se devait de changer... S'il y arrivait, et s'il le désirait surtout. Néanmoins pour Nyla, il avait du ainsi s'ouvrir, lui prouvant que derrière ses airs froid dormait véritablement un être humain. Il n'était pas un démon à part entière. Dieu qu'il aurait voulu...

Vint donc le moment des aveux. Pas tous cependant. C'était beaucoup demander au vampire que d'étaler d'une traite toutes ses pensées, ainsi que ses sentiments, ce qu'il gardait pour lui en somme était toujours enchainé à son être, imprenable. Pour elle cependant, il s'était décidé à franchir le pas. Russel n'avait pourtant pas prévu au début de ce tête-à-tête de lui avouer son crime qui à ses yeux n'en était pas un. Ce qui lui importait était encore de ne pas les rendre complices de sa faute, mais si sa vipère était au courant, Autumn devait l'être aussi. Leur trio ne pouvait pas se diviser, sous prétexte que l'un d'entre eux tentait de les protéger. Le regard de la poupée de porcelaine se baissa alors, elle le connaissait assez pour comprendre que la conversation s'annonçait plus sérieuse. Allait-elle avoir peur de lui ? Impossible, elle resterait sa vipère à qui il ne toucherait jamais, elle le savait.

« Malacci…C’était donc toi, pas vrai ? Je le savais… Nyla le sait au moins ? »

Un léger silence s'installa alors, Autumn ne paraissait pas surprise. Bonne ou mauvaise nouvelle allez savoir. Sans doute aurait-il préféré la voir quelque peu étonnée, cela l'aurait conforté dans l'idée qu'il pouvait passer pour innocent... Innocent. Cette idée lui arracha un sourire amusé. Vraiment, le simple nom de Russel Lenny Mustang associé à la candeur dans une même phrase était impensable. Il était évident que certains lui avait mis le meurtre sur le dos, aussi avait-il préparé le terrain, en tout bon Serpentard rusé et manipulateur qu'il était. Il fut soulagé néanmoins de la voir réagir ainsi, Autumn était dores et déjà une personne digne de sa confiance. Russel hocha alors la tête, se refusant de prononcer les mots fatals "J'ai tué Malacci". On n'était jamais trop prudent. Pour la suite, mieux valait qu'il reste flou dans ses propos, bien que sa vipère en avait perçu tout le sens.

R.~ Elle le sait. Elle m'a rejoint par la suite dans la salle de bain. Un crime pour un rendez-vous, est-ce vraiment sage ?

dit-il avec une pointe d'humour noir avant de reprendre pour s'expliquer plus sérieusement.

Elle m'a aidé à soigner ma plaie. Néanmoins tout est prévu. J'ai embobiné un journaliste et à présent le monde magique est persuadé qu'Almadovar est coupable, pour une sombre histoire de revanche contre les Mustang.

Un sourire à la fois carnassier et amusé se dessina alors sur son visage terne. Certes Russel aurait pu développer bien plus, mais il n'avait jamais été très bavard. Pour autant c'était un miracle qu'il se confie autant à sa vipère, bien qu'un point important n'avait pas été amené sur la table. Nyla et lui ... Le Serpentard hésitait à lui en faire part, de peur qu'elle ne se sente alors exclue. Aussi il se décida à ne rien dire, du moins pour le moment. Perdu dans ses pensées nébuleuses, le jeune Mustang leva alors les yeux sur Autumn, dont la voix douce s'éleva alors.

« Je suis là, Russel. Quoi qu’il arrive, je te soutiens ; quitte à devoir tuer, à devoir donner ma propre vie. Tu sais ce que je pense de tout ça. Je serais là pour toi, je ne t’abandonnerais pas. Quelqu’en soit le prix. »

R.~ Autumn ... Personne ne mérite de mourir pour un vampire. C'est une créature de la nuit, elle vit pour ses crimes. Ca me nourrit vipère, c'est là mon but. N'en fais pas le tien. Je ne veux pas être ta malédiction.

Sa voix froide se faisait des plus sérieuses. Néanmoins les paroles de la douce Perkins le touchaient, il avait trouvé bien plus qu'une alliée de poids. Et Russel ne comptait pas la prendre comme bouclier. Pas ses vipères, ni même les membres de sa famille. Le jeune Mustang s'entourait de marionettes pour encaisser les coups à sa place, mais pas ses proches, intouchables lorsqu'il était à proximité. Il ne voulait pas être condamné à faire du mal à ceux qu'il aimait, sans doute devait-il continuer le chemin seul, pour les en protéger. Le Serpentard n'eut pas le temps de rétorquer de nouveau, que déjà Autumn s'effondrait dans ses bras. Mustang junior resserra alors son étreinte, caressant de ses mains froides les longs cheveux de sa vipère. Comme un parfum de mystère... Sous cet enlacement, une multitude de non-dits.

R.~ Vipère, dis moi réellement ce qui ne va pas ...

Un geste pour un aveu. Le sien ?

« Malacci…C’était donc toi, pas vrai ? Je le savais… Nyla le sait au moins ? »

Malacci, sa mort, les rumeurs qui persistent. Elle savait que son cher directeur de maison n’y était pour rien dans la mort de son cousin. Almadovar ne pouvait pas tuer Matthew Malacci. C’était insensé, et complètement stupide. Il n’avait aucune raison de le faire, ou du moins, aucune raison valable. Un meurtre n’était pas quelque chose qu’on devait prendre à la légère, Autumn était bien placée pour le savoir. Elle savait pertinemment que Russel n’était pas le genre de sorcier à agir sans prendre conscience des conséquences. Elle lui faisait confiance, un peu trop parfois. Et puis quoi, elle devait lui crier dessus, lui dire qu’il avait eut tord ? Non ! Sa propre mère était morte à cause de son père. Si elle avait pu, elle l’aurait tué de ses propres mains, lui faisant regretter d’avoir fait preuve d’autant de violence. Russel était assez grand et mature pour assumer ses actes, aussi horribles soient-ils. Mais Autumn était là, derrière lui. Quitte à devoir mentir, à devoir lui faire un alibi en béton ; tant pis, elle le ferait. Elle avait assez de forcer pour l’aider, quelqu’en soit l’issue. Il avait toujours été là pour réparer ses erreurs, alors pourquoi ne devrait-elle pas en faire autant ? Un crime n’était qu’un crime. Et puis, elle haïssait Malacci au plus haut point. Qu’est ce qu’elle en avait à faire de l’éthique ! La seule chose qui comptait, c’était que Russel soit éloigné de la liste des suspects et qu’il puisse accomplir ce qu’il devait accomplir. Autumn serait là pour l’aider. Elle l’avait juré.

Surprenant, n’est-ce pas ? Pendant que Poudlard était dans tous ses états, elle vivait une romance on ne peut plus floue et étroite. Elle n’avait même pas remarqué ce qui se tramait dans ce château, préférant jouer les fausses égoïstes en ne s’occupant que d’elle. Pas assez important ? Un meurtre ? En y repensant, elle avait des remords, culpabilisant presque. Après tout, qu’avait-elle fait pour lui ? Rien, strictement rien. Elle n’arrivait même pas à lui dire que tout allait bien se passer. Qui l’aurait crut… La grande Autumn, la Princesse la plus pourrie, flanchait devant un seul et unique obstacle ; devoir lui dire la vérité. « Tout se passera bien. » Ca sonnait comme une promesse faite en l’air, de simples mots qui ne voulaient rien dire du tout. Comment pouvait-elle en être sûre ? Almadovar était un sorcier très fort, et très puissant aussi. Il avait réussit à pousser la mère de Russel à la démission, tout en jouant les victimes. Il était bon joueur, un peu trop au goût d’Autumn. Et à la fin ? Un simple Game Over ne lui suffisait pas. Elle n’était pas prête à oublier ses idées par peur du sacrifice, bien au contraire. S’il fallait qu’elle se batte, même contre la mort, elle le ferait. Pour lui, pour eux, pour ce qu’elle cachait depuis plusieurs mois. Ce genre de sacrifices n’étaient rien pour elle, bien au contraire. Elle était encore vivante grâce à eux, alors perdre la vie pou les sauver n’était rien de dramatique… Autumn y avait mûrement réfléchit. Des nuits entières, à vrai dire.

« Elle le sait. Elle m'a rejoint par la suite dans la salle de bain. Un crime pour un rendez-vous, est-ce vraiment sage ? Elle m'a aidé à soigner ma plaie. Néanmoins tout est prévu. J'ai embobiné un journaliste et à présent le monde magique est persuadé qu'Almadovar est coupable, pour une sombre histoire de revanche contre les Mustang. »

« Bien… »

Ses iris croisèrent les sombres pupilles du jeune Mustang, mais elle ne craqua pas. Il avait donc tout prévu ? Pas vraiment surprenant. Russel n’était pas à Serpentard pour rien. Le fait que Nyla soit au courant lui enleva un poids de plus, ce qui lui arracha désespérément un sourire. Elle resta figée de longues minutes, attendant quelque chose qui aurait pu la secouer un peu, la faire réagir autrement qu’en le couvrant de remontrances. Elle se décida enfin à s’approcher, prenant délicatement sa main. Elle n’allait pas partir. Il fallait qu’elle le rassure, ne serait-ce que pour se prouver que tout allait bien se passer, que tout ça n’était qu’une blague idiote. Mais on était dans la réalité…Pas dans un jeu où les gentils et les méchants s’affrontent. Tant mieux, car dans ce genre de jeu, les méchants perdent toujours.

« Je suis là, Russel. Quoi qu’il arrive, je te soutiens ; quitte à devoir tuer, à devoir donner ma propre vie. Tu sais ce que je pense de tout ça. Je serais là pour toi, je ne t’abandonnerais pas. Quelqu’en soit le prix. »

« Autumn ... Personne ne mérite de mourir pour un vampire. C'est une créature de la nuit, elle vit pour ses crimes. Ca me nourrit vipère, c'est là mon but. N'en fais pas le tien. Je ne veux pas être ta malédiction. »

Elle s’arrête un instant, le scrutant du regard. Ses mains tremblent, on dirait qu’elle pleure. Mais ce n’est qu’une illusion, qu’une douce illusion.

« Tu n’es pas ma malédiction, Russel ! Tu es ma bouée de sauvetage. Tu le comprends, ça ? Je veux pas te perdre, merde ! Tu es trop important pour moi… T’es comme mon grand frère, Mustang…Celui que je n’ai jamais eut la chance d’avoir… Laisse moi t’accompagner, laisse moi t’aider. S’il te plaît… »

Elle finit tout de même par atterrir dans ses bras, essayant tant bien que mal de dissimuler sa colère. Elle n’était pas énervée contre lui, non, mais plutôt contre elle-même, contre sa lâcheté légendaire. Autumn June Perkins est une faiblarde, une souillure doublé d’une lâche. Oui, il fallait que le monde entier le sache, qu’on la voit enfin sous son vrai jour. Fille stupide aux airs de souveraine. Elle n’était rien d’autre qu’une âme perdue, rejoignant le bord comme elle le pouvait. Une âme en lambeau, comme le reste de son corps. Son cœur, lui, s’était remit à battre, silencieusement. Elle se détache peu à peu du jeune vert et argent, puis lâche sa main en un sourire bienveillant. Avait-elle été assez explicite pour qu’il comprenne qu’elle n’allait pas le lâcher ? Certainement. Elle s’était sûrement trop emportée, mais tant pis, c’était un moyen de plus pour qu’il s’en souvienne. Elle recula de quelques pas, sa tête levée vers le ciel brumeux, presque gris. Autumn… Ne vois-tu pas que tu souffres à garder le silence ? Ca ne servait à rien de se leurrer. Avant même qu’elle n’ait pu lui dire quoique ce soit, Russel rétorqua quelque chose qui lui fit rire jaune. Désespoir…Simple désespoir.

« Vipère, dis moi réellement ce qui ne va pas ... »

« Je suis enceinte, Russel. »

Un jour de Septembre. Un seul avait suffit pour tout faire basculer.

Please... Un simple mot teint d'une sincérité exacerbée, Autumn devait vouloir ardemment marcher à ses côtés encore pour lâcher de ses lèvres rouges un "s'il-te-plait" qui sonnait comme une ultime requête. Le jeune Mustang ne rétorqua pas, se contentant de plonger ses yeux noirs dans les prunelles mélacoliques de son Autumn, un léger sourire aux lèvres. Celui qui parlait à sa place, et qui signifiait que ses paroles lui faisaient du bien. Son grand frère... Si Russel l'avait toujours vue comme sa petite soeur de coeur, jamais il n'avait pu le lui avouer tant il ne parvenait pas à s'exprimer sur les affaires de sentiments. Leur toute première discussion n'avait pas été des plus banales, cette nuit-là avait marqué d'une croix blanche la naissance d'une relation autre qu'une simple amitié, et les dires de sa vipère vinrent confirmer ses pensées. Elle ne le lâcherait pas, jamais, ayant cette même crainte de le perdre tout autant qu'il ne souhaitait pas qu'elle s'éloigne de lui. Son grand frère... Que savait-il vraiment d'Autumn et de sa famille au final ? Leurs confidences, du moins celles de la douce Perkins, passaient rarement le cap de leur intimité enfouie, celle dont on ne désirait pas parler, tant c'était difficile. Exception faite pour Russel néanmoins, sans doute. Que pouvait-il dire de lui, les gens s'arrêtaient à son nom plus qu'à son passé, et c'était bien mieux ainsi, auquel cas on l'aurait haït d'autant plus.

Le jeune Mustang avait grandi dans un contexte où sa famille était blâmée de toute part... ou glorifiée selon l'opinion des sorciers, mais jamais au grand jour. Lorsque son père disparut, la haine s'abbattit bientôt sur sa famille. Mais le jeune Russel avait dores et déjà commencé à s'en nourrir, l'on percevait dans son regard qu'il n'était plus innocent, même du haut de ses huit ans, tant son animosité semblait venimeuse. Sa détermination était telle qu'il n'en avait jamais souffert, bercé par la douce utopie qu'il retrouverait son père, et qu'il ramènerait avec lui les temps glorieux de leur famille. Ainsi donc, dans son enfance, le petit Prince noir n'avait jamais souffert. En était-il de même pour Autumn ? Il n'irait pas poser la question, estimant que les meilleurs aveux venaient d'eux même, et non pas parce qu'une ombre oppressante les obligeaient à sortir. Néanmoins, il avait toujours lu dans ses yeux bleus, ces petites étoiles brillant d'une souffrance indiscible, celle qu'elle voulait cacher. Mais le Serpentard n'avait pas les mots, ni les gestes, trop méfiant quant à ses propres paroles il n'avait jamais soulevé la question en profondeur. Les prunelles azures de la belle, pleines d'une mélancolie vaporeuse, comme une étrange absence amère. Son regard, empli d'un trop plein de vague à l'âme pouvait tuer de sa souffrance trop languissante ceux qui n'y étaient pas habitués. Alors que les yeux de Russel, trop implacables, ne laissaient rien entrevoir. Il avait appris à accueillir les sentiments des autres à ses côtés, du moins ceux de la douce Perkins. Le Serpentard ne prêtait une oreille attentive qu'aux personnes qu'il aimait. Car oui, le vampire n'avait pas les sentiments éteints, et derrière ces airs glacials se cachaient bien souvent une affection particulière.

La première sans doute à penser réellement qu'il n'était pas une malédiction, néanmoins il n'en était pas convaincu. Peu importait, c'était une satisfaction en soit que d'être le fléau des autres, depuis bien longtemps Russel avait appris à muer leur haine en une force qui agaçait ses ennemis. Il fallait avouer que le Serpentard avait un point de vue singulier sur lui même et ses qualités. Si être maudit amenait avec lui ce pouvoir grisant mais éphémère, alors il s'en accomodait fortement. S'attendant, un jour ou l'autre, à perdre ses proches, le Serpentard s'était forgé un caractère froid et insondable, son attitude violente et impulsive n'était que le reflet de son trop plein de questionnements sans réponse. Etait-il condamné à vivre seul, fallait-il sacrifier l'affection des autres pour le pouvoir suprême, ou fallait-il qu'il lâche les armes, qu'il se retire, afin de vivre sans ombre au-dessus de sa tête ? Impossible. Il aimait le sang, les larmes et la haine. De toute son âme. Oui il était maudit. Et l'ironie faisait qu'il en jouait amplement. Le silence était retombé, l'espace d'une fraction de seconde. Autumn avait reculé de quelques pas, ses yeux posés sur le ciel gris. Attendait-elle qu'on vienne la chercher, là-haut ? Une peine pour quelques gouttes de pluie qui cessèrent de tomber, le petit ange tourmenté semblait appeuré des mots qui peinaient à s'échapper de ses lèvres.

« Je suis enceinte, Russel. »

Une mort pour une vie, cela avait toujours été ainsi. Le Serpentard hocha doucement la tête, son regard déviant sur les tombes en contre-bas, sentant dores et déjà les feux de sa colère latente s'allumer. Il passa sa langue sur ses lèvres blêmes, sans un mot, puis enfin esquissa un sourire. Mais un rictus inquiétant, témoignant de ses démons éveillés. Enceinte... Etait-elle consciente de ses actes... Quel avenir pour elle alors, dans cette guerre qui s'annonçait. Comment la protéger si en son ventre dormait un enfant, lorsque les mangemorts s'en prendraient au monde magique ? Car ils viendraient, tôt ou tard, Russel en restait persuadé. Un silence déroutant s'abattit alors, lorsque le Serpentard ne répliquait pas à un fait important, ce n'était jamais bon signe. Il aurait pu en somme lui demander si cela avait été voulu, et ce qu'elle ferait par la suite... Mais il ne souhaitait pas l'inquiéter d'avantage. Après tout, il resterait près d'elle pour l'aider. Toujours aussi silencieux, ce sourire toujours aux lèvres, il haussa alors les épaules.

R.~ Qui est le père ?

Un silence trop présent pour une réponse qui à ses yeux tardait trop à venir. Le Serpentard haussa alors la voix de sa colère éveillée.

DIS MOI QUI ?

Alors, tout était posé dans sa question. S'il s'agissait d'une histoire sérieuse, si le père serait présent, si elle comptait les garder, si elle était consciente de ce que tout cela pouvait entrainer... Mais si ce foutu père qui avait osé la toucher n'assumerait pas ses actes, alors les retombées en seraient plus que brusques à l'égard de ce dernier. Et sans doute... sans doute le Serpentard serait à ses côtés pour l'aider elle et son enfant. Espérons que la réponse soit celle qu'il attendait.

Tu vois, Autumn. La vie n’est pas quelque chose de bien confortable. A-t-on avis, pourquoi certains s’en vont de leur plein gré ? Autumn, Autumn. Les rêves ne sont là que pour apaiser les souffrances, et non pour être réalisés. Regarde toi. Tu as dix sept ans, et tu suis les traces de ton père. Un être infâme, dis tu ? Mais tu lui ressembles, comme deux gouttes d’eau. Plus que tu ne le penses, Cendrillon. Ton cœur n’est pas pur, non, tes mains ne sont pas si blanches. Ton passé n’y est pour rien, tu es la seule fautive. Tu as laissé partir ta sœur, comme tu as laissé partir ta mère. Tu les avais oubliées ? Ces deux anges déchus. Elles n’ont pas eut le choix, elles. Ta souillure de père a fait en sorte qu’il ne reste que toi, ainsi il savait que tu allais prendre la relève. Pourquoi s’obstiner alors que l’évidence est là, toute proche ? Ce n’était pas un homme bien, et tu le suivras quoi qu’il arrive. Faire cette promesse à Russel, c’était un moyen de plus pour qu’elle se rassure. Son avenir n’était pas parmis les bohèmes, elle avait déjà choisit son camp, quitte à y laisser ses ailes et ses plumes. Pour lui, simplement pour lui. Pour un sourire, un mot, pour des choses pourtant si futiles. Elle avait décidé de le rejoindre, lui avait juré fidélité comme une simple épouse, pour le meilleur et pour le pire. Elle savait que le pire était à prévoir, et qu’il était beaucoup moins rare que le meilleur. Mais n’était-ce pas ce que devait une petite sœur à son grand frère ? L’aider à surmonter les épreuves, le soutenir jusqu’à son dernier souffle. Autumn n’avait jamais envisagé sa vie sans le jeune Mustang. Un gouffre ? Oui, c’était ça. Après tout, il avait eut l’audace de la sauver. « Tu es ma bouée de sauvetage. » Elle ne mâchait pas ses mots en lui disant ça. Perkins était peut être une traînée aux yeux des autres, mais elle avait ses principes.

La pluie battait à nouveau lentement. Une goutte vint s’écraser sur l’épaule de la jeune vert et argent, suivit d’un sourire mélancolique. Autumn était ainsi ; nostalgique, morose. Elle avait su se faire des visages, des masques pour cacher la vérité. Mais elle restait la même. Chassez le naturel, il revient au galop. Autumn n’était pas une exception, malgré ce qu’elle ne cessait de se dire. Elle était pareille que les autres. Une fille fade, sans emprunte, et dont l’aura était des plus sombres. Neurasthénique. Elle fut soulagée du silence du jeune Mustang, puis perturbée par une douleur au niveau de son ventre. La jeune Septième Année n’avait pas à chercher bien loin, elle savait d’où venait ces douleurs atroces, comme des coups de pied gênants. Elle plaqua sa main contre son ventre, ferma les yeux quelques instants jusqu’à respirer maladroitement. Aucun regard suppliant envers son tendre Vampire ; elle n’aimait pas attirer la pitié des autres, surtout des personnes qu’elle estimait le plus. C’était une faiblesse, peut être la plus importante, celle qu’elle essayait de dissimuler. Après tout, n’était-elle pas censé être une fille dépourvue de tout sentiment, une fille au cœur ligoté et enchaîné ? Ah. Certes, son cœur était prisonnier. Mais par autre chose que cette peur de souffrir. Il avait été crucifié par l’amour, détruit puis reconstruit en seulement un regard. Oui, ça suffisait. Un regard, et elle revivait. Un regard et son cœur battait à nouveau au rythme du sien. Une cadence qui lui faisait mal. Mais c’était un mal pour un bien.

Est-ce que Russel savait tout ça ? Tout ce qu’elle endurait, jour après jour ? Elle avait mal, oui, plus que quiconque. Et le temps n’avait pas joué en sa faveur. Il fallait qu’elle cesse de mentir, qu’elle ait enfin le courage de lui avouer ce qui la préoccupait depuis tant de temps. « Tu es faible, tu le sais. » Elle serre son poing, son autre main toujours délicatement posée sur son ventre. Elle souffle, tremble, mais se bat toujours pour ne pas que ses jambes heurtent le sol. La pluie devient de plus en plus rapide, passant à travers les arbres. Autumn rouvre alors les yeux, dévoilant ses pupilles dilatées. Elle regarde les pierres tombales, puis retient les larmes avec une force qu’on ne lui connaissait pas. Si elle était vraiment faible, pourquoi restait-elle ici ? Pourquoi ne partait-elle pas ? Son cœur battait plus vite, jusqu’à ce qu’elle recule de quelques pas. Ses yeux évitent les prunelles sombres du jeune vert et argent. L’affronter lui, c’était la pire des choses. Alors que les questions fusaient de partout, Autumn fouilla dans sa poche pour en retirer sa baguette. Elle la serra tellement fort qu’elle faillit la briser en deux. Les mots étaient là, prêts à être dis. Prêts… Oui, elle devait lui dire. Un peu d’honnêteté, pour une fois. Ca n’allait pas leur faire de mal.

« Je suis enceinte, Russel. »

Difficile de faire mieux, Autumn n’était pas quelqu’un qui parlait avec beaucoup de tact. Ses morts suivirent la cadence des battements de son cœur, elle grelottait, titubait lentement de long en large. Ses pas se faisaient douloureux, comme ci chacun d’entre eux produisait le même effet qu’un poignard, qu’un coup de machette en plein visage. Cendrillon, princesse perdue, n’a écouté que son cœur qui lui criait d’arrêter le mensonge. Elle venait de faire tomber le masque, et sans le vouloir, elle s’était montrée plus forte que jamais. Ses yeux rivés sur le ciel, la tête levée, elle contemplait les nuages couleur brume, évitant tant bien que mal les gouttes qui dégoulinaient le long de sa peau laiteuse. Russel avait tous les droits sur elle, tout comme Nyla, ou encore Aaron. Il en faisait ce qu’il voulait, et elle était prête à encaisser n’importe quoi. Colère ou autre, elle se tenait prête à faire face, sentant ses mains se crisper d’elles mêmes. Autumn perdait pied, mais commençait à y voir plus clair. Le fit d’être enceinte n’avait pas été un lourd problème à assumer. Elle était consciente de tout ce qu’une mère devait faire, et ne comptait pas se séparer de ce qui prenait vie dans son propre corps. « Un jour tu connaîtras la sensation merveilleuse de donner la vie à un petit bout. Tu le regarderas grandir avec ce même œil tendre et bienveillant. » Le seul obstacle était d’en parler. Affronter ça seule, c’était certainement la plus mauvaise chose à faire.

« Qui est le père ? DIS MOI QUI ? »

C’est ce qu’Autumn redoutait ; le jeune Mustang l’avait mal prit. C’était à prévoir, et de toute façon, elle se doutait bien qu’il n’allait pas sauter de joie. Malgré tout, elle ne pouvait s’empêcher de le scruter d’un regard noir. Elle s’arrêta, resta figée quelques instants, ses yeux bleus se plantant immédiatement dans ceux du jeune Serpentard. Avait-il seulement conscience qu’en réagissant ainsi, il lui faisait du mal ? Oh oui, c‘était si facile. Assumer ses ébats, bien sûr, en y réfléchissant de plus près, c’était logique. Mais il aurait pu lui dire autre chose, non ? Un « tu t’en sortiras, je serais là » n’était pas de refus ! La jolie brune s’approcha alors, jusqu’à arriver à sa hauteur. Elle était largement plus petite que lui, et se trouva obligée de lever la tête pour le fixer à nouveau dans les yeux.

« Ne me parle pas sur ce ton, Mustang ! »

Ses poings se serrent à nouveau, tout comme son cœur. Elle le regarde, à la fois écoeurée et déçue. Pourtant, elle n’était pas surprise. Alors maintenant…Q’est ce qu’elle devait faire ? Se jeter du haut de la tour d’Astronomie pour ne plus rien ressentir, pour que cette douleur physique cesse une bonne fois pour toute ? Bien. Si c’était la seule solution, elle le ferait. Après tout, elle n’avait pas à infliger ça à Aaron. Il avait tout le temps de vivre, de vivre heureux…Elle n’avait pas le droit de lui priver de sa jeunesse. Mentir pour mieux repartir ? Russel se doutait sûrement que le père de cet enfant n’était autre que le jeune Vanna Syl. Après tout, il était le seul amour qu’Autumn n’ait jamais connut.

« Je pensais que tu allais me rassurer ou me soutenir, mais je crois que je me suis trompée. Après tout, c’est vrai, la traînée que je suis allait tôt ou tard accoucher d’un bâtard ! Dis le Russel. DIS LE ! AUTUMN EST UNE TRAINEE ! Vas y. DIS LE ! Je sais que tu le penses. J'ai que ce que je mérite, à force de sauter tout ce qui passe...C'est vrai ça, hein ? HEIN ?! »

Les mots sortent, elle hausse la voix. Elle était presque en colère. Presque.

« Cet enfant, je le garde. Tu sais pourquoi ? Parce que son père n’est autre que l’homme de ma vie. Je veux pas faire la même connerie que mes parents, que mon salop de père. T’entends ? J’aimerais ce gosse, même s’il me fait du mal. Je l'aimerais et prendrais soin de lui. Regarde… »

Autumn se baisse légèrement, retire son pantalon et dévoile ses petites jambes frêles. Un frisson vient lui parcourir le corps, mais ça n’a pas d’importance. En quelques secondes, elle se retrouva en petite culotte, ses yeux fixés dans ceux du jeune Serpentard. Ainsi, en soulevant légèrement son haut, elle lui dévoile des cicatrices qui ont peine à partir. Les traces du passé. Elle rit, un rire nerveux effrayant, puis ferme les yeux. Bordel qu’elle avait mal. Avait-il assez de preuves, maintenant, pour affirmer qu’Autumn était bien consciente et prête à assumer, quitte à devoir élever son enfant seule ? Elle s’éloigna de lui, jusqu’à poser à nouveau sa main sur son bas ventre.

« Ne me blâme pas, Russel. Ni moi, ni même Aaron. »

Un soupir. L’histoire d’une vie, l’espace d’un instant.

Il fallait s'attendre à une colère noire de la part du Serpentard, et pourtant celle-ci n'était que l'étendue de ses inquiétudes pour elle. Ces mots violents soudain se voulaient fiévreux qu'à l'adresse du père en question, une préoccupation indélicate et mal exprimée envers Autumn. Dans ses paroles trop virulentes, il n'y avait que ce tourment caché que le père ne la lâche sitôt la nouvelle apprise. Mais il était fortement à prévoir, que dès lors la conversation se ferait plus intense. Sitôt sa colère éveillée, il était difficile de la taire, parfois ses gestes devançaient ses pensées comme un démon possédé. Russel avait toujours été un danger pour les autres, mais involontairement c'était aussi ses proches qu'il faisait souffrir ou qu'il pouvait blesser. Le jeune Mustang aurait cent fois aimé réagir autrement, la prendre dans ses bras, lui dire qu'il l'était là, à ses côtés. Car il l'était, quoiqu'il arrive, mais ses paroles enchainées qu'il ne permettait pas de s'échapper ne pouvaient le lui avouer. Le Serpentard passa une main sur son front blême dans un soupir qui souhaitait ralentir sa respiration saccadée par l'énervement. Autumn, Nyla... elles ne méritaient pas ces excès de colère, il se devait de contrôler ses démons pour ne plus les lâcher sur elles. Mais malgré toute sa volonté, cela lui semblait impossible. Son impulsivité telle une furie qui prenait possession de son corps pouvait éclater d'une seconde à l'autre. Mais il ne lèverait pas la main sur elles. Jamais.

Sa vipère lui adressa un regard plein de dégoût, ce qui étrangement fit sourire Russel d'un rictus plein de sarcasme. Ses démons à présent éveillés, tout n'était plus qu'ironie et paroles violentes. Autumn vint alors à sa hauteur, et le Serpentard se contenta de la fixer intensément de son regard froid, attendant la suite avec une certaine impatience. Enceinte... Il craignait simplement qu'elle ne se retrouve seule avec son enfant, du haut de ses dix-sept ans et si fragile de l'intérieur, Russel s'inquiétait de la voir se briser si le père venait à partir. Et c'est ainsi, par sa colère soudaine, qu'il exprimait ses inquiétudes. Certes il fallait le comprendre, plus encore il fallait qu'il parvienne à se maîtriser. Pour un peu, le jeune Mustang lui aurait sifflé d'un ton sec de ne pas s'approcher de lui, simplement pour ne pas qu'un geste trop vif ne vienne attraper ses poignets. Mais il s'abstint alors, estimant que cette fois son calme se devait être plus forte que ses démons rageurs.

« Ne me parle pas sur ce ton, Mustang ! »

R.~ Et s'il m'en vient l'envie, Perkins ?

Il hocha alors la tête d'un signe négatif, une langue sur ses canines, silencieux soudain. Leurs voix froides tranchaient l'air avec vigueur, la réplique glaciale de Russel n'avait pas lieu d'être, mais encore une fois il ne put se controler, son insouciance trop au devant des choses pour encaisser sans rien dire. Son visage presque réprobateur ne cessait de la fixer intensément, il avait remarqué ces poings serrés qui tremblaient de rage. Alors enfin, les prunelles sombres du Serpentard se détournèrent de celles de son amie, elle le connaissait assez bien pour savoir que le jeu qu'il entreprenait n'était pas volontaire, et qu'il regrettait déjà ses airs glacials. Oui c'était juste... cette peur qu'elle se retrouve avec un petit dans les bras, le père envolé comme par miracle. A l'entendre lui et sa confiance qu'il ne donnait qu'à peu de personnes, sur cette terre il n'y avait que lui-même qui pouvait veiller au bien être de ses vipères. Aujourd'hui néanmoins, il se devait d'accorder sa confiance à un autre. Chose difficile.

« Je pensais que tu allais me rassurer ou me soutenir, mais je crois que je me suis trompée. Après tout, c’est vrai, la traînée que je suis allait tôt ou tard accoucher d’un bâtard ! Dis le Russel. »

R.~ Arrête vipère, calme-toi...

« DIS LE ! AUTUMN EST UNE TRAINEE ! Vas y. DIS LE ! Je sais que tu le penses. J'ai que ce que je mérite, à force de sauter tout ce qui passe...C'est vrai ça, hein ? HEIN ?! »

R.~ Ah c'est ce que je pense ? VRAIMENT ?

Le calme en lui n'était guère resté allumé en lui très longtemps. Ces paroles assassines lui faisaient l'effet de l'ami qui pensait des atrocités sur sa soeur de coeur, de ce fait il n'avait pu se contenir d'avantage. Néanmoins Russel eut la présence d'esprit d'esquisser un pas en arrière et de lui tourner le dos, évitant tout débordement incontrolable. Il posa alors ses mains sur son visage dans un soupir las. Il ne voulait pas d'une dispute futile, libérée par sa colère exacerbée. Il souhaitait simplement lui faire comprendre qu'il serait là pour la soutenir, mais le Serpentard, s'il avait les mots parfaits pour manipuler, manquait cruellement de tact lorqu'il s'agissait d'affaires de sentiments. Il expira alors lentement, ses yeux sombres posés sur l'arbre dit du pendu, attendant de retrouver son calme. Pour elle.

« Cet enfant, je le garde. Tu sais pourquoi ? Parce que son père n’est autre que l’homme de ma vie. Je veux pas faire la même connerie que mes parents, que mon salop de père. T’entends ? J’aimerais ce gosse, même s’il me fait du mal. Je l'aimerais et prendrais soin de lui. Regarde… »

Après de longues secondes qui paraissaient interminables, Russel se retourna enfin. L'homme de sa vie, cela faisait déjà partie des bonnes réponses qu'il voulait entendre. Etrangement la flamme vacillante dans ses yeux sombres se radoucit, comment avait-il pu lever la voix sur sa vipère... Et si ses gestes vifs avaient trahi sa colère. Oh il avait raison, il était maudit. Il avait fallut faire un pas en arrière, pour s'assurer que ses démons ne lui jouent pas des tours. Des cicatrices dévoilées par le pantalon qu'elle ôta, sur ses cuisses et sur le ventre, les traces immondes de ce père qu'elle évoqua. Inutile d'en dire plus. Russel ne sortit pas un mot, seulement à présent habité d'une haine envers cet homme qui avait osé toucher sa propre fille. Il la vengerai quoiqu'il arrive, que cet homme soit mangemort, simple sorcier ou personnage important, plus rien ne comptait. Ses airs froids redevinrent bienveillants, Russel s'approcha d'elle alors toujours silencieux. Ses yeux croisèrent les siens lorsque le Serpentard la vit s'éloigner. Il espérait fortement que ce n'était pas une réaction défensive inconsciente, auquel cas cela l'aurait conforté dans l'horrible idée qu'elle avait peur qu'il ne lève sa main sur elle. Comme son propre père. Ses doigts se posèrent sur ceux de la jolie Perkins, la sommant doucement de lâcher son haut qui se rabattit sur son ventre blanc, puis enfin boutonna le manteau qu'il lui avait posé sur les épaules de longues minutes auparavant. Ce n'était pas grand chose, mais tout au moins cela couvrait une bonne partie de son anatomie dévoilée au jeune Mustang, lui arrivant à mi-cuisse.

« Ne me blâme pas, Russel. Ni moi, ni même Aaron. »

R.~ Je ne blâme personne, je veux juste pouvoir veiller sur toi.

Le ton de sa voix avait quelque chose de ferme et strict, mêlé à une certaine tendresse. C'était en réalité sans doute, la plus belle des preuves d'affection malgré cette voix tranchante. C'était là l'ordre qu'il lui donnait de le laisser la protéger. Son regard toujours posé sur le manteau qu'il finissait de boutonner, se posèrent enfin sur sa vipère qui se tenait le ventre.

R.~ Tu ne devrais pas rester si longtemps debout, dans ton état.

Il hocha alors la tête, et sans crier gare la prit dans ses bras avec douceur avant de la déposer au pied de l'arbre centenaire, quelques mètres plus loin. Lorsqu'il l'assit alors, Russel s'accroupit devant elle, la fixant intensément de ses yeux noirs mais moins froid, sa main venant rabattre une de ses longues mèches de cheveux derrière son oreille.

R.~ Ton enfant... je serai là, si vous avez besoin... Et ton père, laisse moi m'en occuper... Pourquoi ne m'as-tu jamais rien dit ?

Un silence bercé par le vent. La façon néanmoins dont le jeune Mustang avait parlé de ce salaud qui avait osé la maltraiter ainsi, ne présageait rien de bon, ni même les flammes assassines de son regard. Durant de longues secondes interminables, on entendait plus que les feuilles fouettées par la brise. Il serait là pour veiller sur elle, indéniablement, mais avant tout, il y avait également Nyla qu'il se devait de protéger.

R.~ Vipère...

dit-il enfin.

Nyla et moi sommes ensemble. Et je l'aime au point que mon coeur me fait souffrir chaque fois que je la vois.

Une vérité pour une autre, son regard s'accrocha au sien, afin d'en recueillir ses réactions. Les mots de Russel étaient pour le moins surprenants, lui qui semblait être destiné à ne jamais aimer personne, voilà que Nyla avait ennivré ses sens.

Tout n’était qu’une affaire de temps.

Les minutes passaient, des minutes identiques à des poignards qu’on se prend en pleine poitrine. La petite brune suffoquait, agonisait dans un corps qu’elle n’avait jamais su accepter, même étant enfant. Le temps, le temps… Et si elle n’en voulait pas ? Après tout, elle n’avait pas choisit d’être là, sur cette Terre, et enceinte de surplus. Elle, ce qu’elle voulait, c’était oublier. Oublier le monde, oublier le passé, oublier toutes ces choses qui l’empêchaient d’avancer. Son cœur s’arrête alors, l’histoire de quelques battements. Ses yeux regardent le vide, inlassablement, ils se font froids et sans éclat. Aucun sourire ne vient prendre possession de ses lèvres, aucun souffle chaleureux ne vient se déposer dans l’air ; la jeune Septième Année reste là, figée, incapable de dire quoique ce soit. Quelque part, elle réfléchit, elle repense à la réaction de Russel, imagine celle d’Aaron. Etait-ce normal de craindre le pire ? Après tout, elle avait bel et bien peur. Peur d’être seule, de devoir tout assumer. Elle était trop faible pour réussir à se maintenir en vie après ça, après avoir été abandonnée et après avoir accouché. Elle n’avait pas les épaules assez larges pour supporter de nouvelles désillusions, ayant été trop baignée dans des illusions qui s’avéraient être des promesses en l’air. Et même aujourd’hui, ça continuait. On lui promettait sans cesse protection et bonheur, mais elle n’en avait pas encore vu la moindre parcelle. Ce qu’elle voyait ? A vrai dire, plus rien. Elle était comme aveugle au milieu de trop de lumière, incapable de faire la différence entre son imagination et ces silhouettes floues qui s’avançaient vers elle, titubant presque. Ce qu’elle voyait, elle, c’était la réalité, qui dépassait parfois ses rêves et ses espérances. Elle n’avait jamais su rêver, même avec tout son bon vouloir. N’était-ce pas ça la raison de sa mélancolie, de cette tristesse qui se niche sans cesse dans son regard, et même dans ses plus pâles sourires ? Ses yeux couleur pastel ne mentaient pas, Autumn était loin d’être la fille la plus heureuse de Poudlard. Très loin, même.

Et le temps, parfois, ne fait que reconstruire l’amour.

Parfois, il arrive qu’elle s’abandonne aux doux songes, à ceux qui égalent presque le rêve. Elle y retrouvait son cher vampire et, là, elle se sentait en sécurité. Bien loin de la fatalité, des massacres de la vie. Loin des mensonges, de la bêtise humaine. Non, Autumn avait toujours eut confiance en Russel. Il avait su être à l’écoute, même silencieux, elle savait qu’il était là. Elle passait énormément de temps à le contempler, du coin de l’œil, tout en se disant qu’avec lui, elle avait de quoi être heureuse. Il avait tout fait pour elle, comme ce confident qu’on imagine sans cesse, le cherchant du regard comme on cherche une ombre en pleine lumière. Elle l’avait sentit depuis le début, à la fois proche mais si lointain à la fois, comme une âme qu’elle n’aurait su distinguer, cette âme errante qui retrace un chemin qui s’avérait être le leur. Qui aurait pu croire qu’elle finirait par l’aimer plus que quiconque ? D’abord lui, puis Aaron. Les deux hommes de sa vie, pour qui elle aurait tout sacrifié, même sa propre vie. C’était un sentiment inexplicable, celui qu’on ressent quand tout devient possible. Avec eux, elle sentait l’avenir sous ses doigts. Peut être même dans son ventre, qui sait ? Elle savait que, quelque part, le fait qu’elle soit enceinte n’avait en rien changé ses sentiments envers Aaron. Il était son âme sœur, celle qu’elle ne cessait de dévorer du regard lors de sa Première Année, celle qu’elle attendait, allongée dans un lit trop grand pour elle. Avait-elle droit de rêver de sa présence, alors que les rêves lui étaient interdits ? Certes, en lisant les contes de fées, elle le voyait comme étant son Prince Charmant. Mais lui n’avait voulu être qu’un preux Chevalier, un de ceux qu’on contemple en silence, et qu’on fait semblant d’ignorer. Elle avait enfin trouvé un roi et un protecteur, deux hommes qui redonneront certainement un sens à sa vie. Peut être comme cet enfant. Son enfant.

Autumn ne s’attarda pas sur les détails, préférant garder le silence au lieu de créer encore plus de tension. Après tout, elle savait que Russel agissait uniquement pour son bien ; elle le connaissait, et savait pertinemment qu’il s’emportait vite. Malgré tout, elle était prête à assumer ses erreurs, même seule. Ayant eut l’exemple avec son père, Autumn avait conscience des fautes qu’il ne fallait surtout pas faire, surtout avec un enfant à charge ; tomber dans le vice n’était pas une solution, et elle était prête à lutter contre n’importe qui pour s’en sortir. Il fallait qu’il comprenne, qu’il sache qu’elle en était capable. Elle comprenait, à cet instant précis, c qu’avait ressentit sa mère en partant. S’être battu durant des années pour, au final, mourir en abandonnant ses enfants, dans l’espoir qu’ils vivent heureux… Autumn ne voulait pas que le schéma se reproduire, elle ne voulait pas connaître ce sentiment étrange, cette sensation qui nous tord le ventre, qui fait couler les larmes jusqu’à ne plus pouvoir bouger. Au risque d’être seule, elle avait besoin de se conforter dans l’idée qu’elle était assez mature et responsable pour élever cet être innocent, et ne pas l’abandonner au moindre écart ou faux pas. Inconsciemment, elle venait d’enlever son pantalon, s’apprêtant à élever un peu plus son tee shirt, de façon à ce qu’il puisse voir l’étendu des dégâts causés par son propre père. Les cicatrices, à la fois fines et pourtant bien incrustée dans sa peau, faisaient remonter les mauvais souvenirs, les mauvais démons qui sommeillaient en elle. Un pas en arrière, puis la jeune vert et argent ferme les yeux. Tout d’un coup, elle sent les mains de son cher et tendre confident rabattre le manteau qu’elle avait sur les épaules. Elle ne pu s’empêcher d’esquisser un sourire tendre, jusqu’à rouvrir petit à petit ses yeux aux couleurs océaniques. Il est là, devant elle. Grand et fort, sûrement capable de se battre avec elle. Dans un soupir, elle prend sa main, tremblant comme ci la fin du monde s’annonçait. Elle le dévisage avec un regard tendre, cette lueur dans ses yeux qu’elle n’a qu’en sa présence.

« Ne me blâme pas, Russel. Ni moi, ni même Aaron. »

« Je ne blâme personne, je veux juste pouvoir veiller sur toi. »

« Tu sais ce que j’en pense. Tu sais ce que je pense de toi, la place que tu as dans mon cœur. Je n’ai pas envie qu’on se tourne le dos, et ce, jamais…Tu entends ? Jure le moi, jure moi qu’il ne m’arrivera rien, que tu resteras toujours près de moi, comme aux premiers jours. J’ai toujours eut besoin de toi, Russel. Toujours. »

C’était difficile à dire, difficile à avouer. Les sentiments, Autumn n’avait jamais su les partager. Un manque de courage, ou peut être une protection en plus… Le fait était tel qu’elle n’avait pas l’habitude des grands discours, ceux qui accroche et qui dévoile tout. Elle faisait partit des gens qui usait trop peu des mots, et qui comptait uniquement sur le regard pour tout dire, pour tout annoncer. Elle sourit à nouveau, sentant la pluie battre encore et encore, à ne plus pouvoir s’arrêter. Ses cheveux sont trempés, se collent à sa nuque. Elle frisonne, tressaillit, mais reste forte. Sa main droite se posa immédiatement sur son ventre, comme pour créer une barrière en plus entre l’enfant et le froid qu’il faisait à l’extérieur. Son autre main, tout aussi frêle et petite que la droite, était toujours dans celle du jeune Mustang. Le regard fuyant, elle se tenait là, presque à découverte, incapable de dire un mot. Ainsi, elle paraissait innocente, affaiblit. Il savait qu’elle était fatiguée de se battre, de lutter tant bien que mal contre la réalité. Une réalité qui devenait, d’ailleurs, de plus en plus dure à vivre… N’était-ce pas son rôle de grand frère de cœur ? Protéger inlassablement sa petite sœur, la tenir par la main pour la guider, elle qui, si souvent, trébuchait… En y repensant, elle se devait de le remercier. Mais les mots ne venaient pas ; elle se contenta de quelques larmes, et de ce regard perçant. Il se mit à la porter en direction du seuil d’un arbre, préférant ne pas prendre de risque. Dans une pointe d’humour, elle aurait certainement dit qu’elle n’était pas encore arrivée au point où elle agonisait dans un lit d’hôpital, en aillant pour seul prière des cris mêlant angoisse et douleur. Puis vint le moment des révélations. Celles qui pèsent lourd dans un cœur déjà surchargé.

« Ton enfant... je serai là, si vous avez besoin... Et ton père, laisse moi m'en occuper... Pourquoi ne m'as-tu jamais rien dit ? »

« Merci, Russel…Merci pour tout…Quant à mon père…Je…Je n’ai jamais voulu ressasser les mauvais souvenirs. En ne disant rien, je me confortais dans l’idée qu’il…N’avait jamais rien fait…Je ne crois pas en sa mort, tu sais. Je suis sûre qu’il se cache, et…Je veux pas passer ma vie à le chercher, Russel. J’ai envie de tout oublier…Tout…Les coups, les humiliations, le vi…Le viol… »

Elle déglutit difficilement, son cœur rate quelques battements, et intérieurement, elle lutte contre le flot de larmes qui s’apprête à envahir ses iris. Autumn serre tant bien que mal la main du jeune Serpentard, jusqu’à ressentir une petit douleur au niveau de son bas ventre. Elle sursaute, puis ferme les yeux, avec pour seul but d’oublier cette migraine atroce qui venait à nouveau de se déclencher. « Vivre pour aimer, aimer pour vivre. » Etait-elle à la hauteur ? Allait-elle l’aimer, le rendre heureux ? Elle qui n’avait pas l’habitude de s’attacher aux gens, qui fuyait toute sorte d’accroche… A nouveau un silence qu’il s’apprête à abattre. Un sourire faible se niche sur ses lèvres, mais il disparaît très vite ; a lui demande trop d’effort.

« Vipère... Nyla et moi sommes ensemble. Et je l'aime au point que mon coeur me fait souffrir chaque fois que je la vois. »

« … »

Elle marque une pause, jusqu’à lâcher la main du jeune Mustang. En même temps, c’est son cœur qui lâche.

« Je savais que ça arriverait un jour…A contre cœur, je m’y étais préparée… Je pensais te garder pour moi, Russel. Mais je me suis encore une fois trompée…Enfin, ça me rassure que ce soit Nyla. Vous allez très bien ensemble, et d’ailleurs…Je vous souhaite plein de bonheur. »

To make those rainbows in my mind.

» ELLE & ROXANNE *
» Dasha & Elle & Yuki