I. CASSE, DÉTRUIT, SI TU VEUX L'AVOIR.

Invité

– En Polonais – « PUTAIN ! »

« Qu’est-ce tu dis ? »

« Je priais. »

« Ah, c’est bizarre ! Dis moi, en Pologne vous priez toujours en dessous de la table ? »

– En Polonais – « Petite conne. »

Accroupie en dessous de la table depuis plus d’une heure, Kataryna cherchait l’introuvable. Se redressant rapidement, elle se cogna la tête, et hurla. Un cri de rage, de colère, et rempli de haine. Elle ne comprenait pas. Elle n’arrivait pas à admettre l’impensable. Toutes les personnes de la salle la fixaient. L’attraction du jour se disait-elle. Inspirant, elle tourna les talons, et se mit à courir en direction du cadre. Pour un vendredi soir, les couloirs étaient vides. Que-ce passait-t-il ? Sourire. Elle s’en fichait royalement. Elle avait rendez-vous avec Arrogance, comme chaque vendredi soir. Ou plutôt, comme chaque soir.

Glissant ses mains dans ses poches, Kataryna ferma les yeux quelques minutes. Elle se perdit dans le néant de ses pensées et fit le vide dans sa tête. Très vite, elle comprit que la montre n’avait pas disparu, et qu’elle n’avait pas été volée. Arrogance s’était débrouillé pour la prendre en cachette ! Pourtant, aux dernières nouvelles, la montre était pour elle, c’était à son tour d’ouvrir le jeu, non ? Elle rouvrit les yeux et l’escalier arriva. Sur les marches, certains cadres lui lançaient des clins d’oeils, insensible à cela, Kataryna leur tira la langue.

« Où allez-vous comme ça, Kataryna ? »

« Bonsoir Madame Pravda. Excusez-moi, mais je dois me rendre à la bibliothèque, j’ai oubliée mon livre. Puis-je ? »

« Faites, faites. »

Poliment, Kataryna remercia la directrice, et la jeune fille prit congé. Son sourire était si élégant que n’importe qui pouvait croire à ses mensonges, elle était si maligne, qu’elle arrivait toujours à ses fins. Dans la bibliothèque, Kataryna se laissa tomber sur un banc, et attrapa un livre, elle y déchira une feuille et sortit son stylo.

« Tu savais que j’allais culpabiliser à l’idée de ne plus la trouver. Je sais ce que tu as pris. Pourtant, Arrogance, c’était à mon tour. Débrouille toi pour être dans dix minutes à la salle des trophées. »

Plissant le visage, Kataryna siffla. Méloudy s’engouffra par une fenêtre et se laissa atterrir lentement sur la table. Une caresse amicale, un échange de sourire.

« Arrogance. »

En ses mains, Kataryna plia le papier, et l’attacha à l’aide d’une corde sur la patte de Méloudy. La chouette émit un cri, et s’envola. Baissant la garde, la jeune fille se leva, et se mit à marcher en direction de la salle des trophées.

I'm sorry.

Arrogance se redressa sur son lit, et se sentit honteux d’avoir rompu l’engagement qui le liait à Kataryna. La montre brillait dans le creux de sa main, et égrenait les heures, les minutes, les secondes. Quel objet idiot. La montre n’avait sans doute pas conscience d’être l’enjeu d’une amitié plus que précieuse pour le Vanna Syl. Mais il n’avait pas pu s’empêcher de la dérober en cachette à Kataryna. Il s’était senti poussé. Après tout, c’était celle de on père ; il avait un droit légitime dessus. Mais donner, c’est donner. Reprendre, c’est voler. Et Arrogance n’était pas un voleur. Le jeune homme se releva complètement. Il allait la rendre à Katy, puisque c’était son tour. Et s’excuser platement. Il espérait seulement que la Sixième Année allait le pardonner. Il ne voulait pas perdre son amie.

Seulement, il fut devancé. Une petite chouette fit toquer son bec contre la fenêtre ; Arrogance reconnut Méloudy, l’oiseau de Kataryna. Le cœur du Serdaigle fit un bond, il se précipita vers l’oiseau qui l’attendait tranquillement. Il déroula le mot avec des mains tremblantes. Le ton était … légèrement menaçant. Arrogance savait qu’il avait provoqué la colère de son amie. Quel idiot il avait été ! Plus jamais il ne recommencerait. Il le promettait sur Aaron. Le jeune homme enfila une chemise et épingla son insigne de préfet dessus, glissa sa baguette dans sa poche et partit d’un pas rapide en direction de la salle des trophées.

Il fit de son mieux pour arriver avant le temps donné par son amie. Il entra dans la salle des trophées ; il n’y avait personne. Arrogance poussa un soupir de soulagement, et alla s’asseoir sur l’un des bancs. Il laissa vagabonder son regard bleu électrique sur les trophées qui se trouvaient dans la salle. Trophées de quidditch, noms inconnus, visages souriants des étudiants sur les photos mouvantes. Arrogance ferma les yeux et les rouvrit un instant plus tard. Kataryna allait certainement bientôt arriver. Il se demanda quel serait le défi, cette fois-ci. Car il était certain que Kataryna ne ferait pas que récupérer la montre ; elle lui lancerait quelque chose.

Des pas. Le cœur d’Arrogance se mit à battre plus vite. Kataryna … Que lui réservait-elle ? Il était toujours surpris par son amie. Elle était si surprenante, justement. Jamais à court d’idées pour leurs petits défis entre amis. Mais Arrogance non plus n’était pas mal dans son genre. Ses défis à lui cherchaient plutôt à éprouver la résistance, tandis que ceux de Kataryna étaient plutôt d’une nature … « Cap ou pas cap », justement. Arrogance avait déjà une nouvelle idée pour son prochain défi. A cette pensée, il eut un faible sourire. Arrogance cligna des yeux. Quand arriverait-elle ? Les pas se rapprochaient.

« Kataryna … »

Un murmure, un prénom. Mais cela voulait dire tant de choses pour Arrogance. Dans ces quatre syllabes, il y avait une partie de sa vie, un oxygène essentiel. Le Russe était tendu comme un arc. Sa respiration était plus vive, le rythme de son cœur saccadé. Il avait mal tant il était nerveux. Mais rien ne se voyait, il était impassible. Comme d’habitude. Une véritable statue de marbre.

Invité

La vie n’est pas un film. Nous ne sommes pas des acteurs. Nous ne savons pas recommencer les scènes à chaque fois. Il n’y pas la touche PAUSE, ni la touche STOP. Notre vie se joue en continue. Ça, Kataryna le savait, depuis le début. Mais sa vie à elle se jouait en lecture rapide. Elle courait derrière une montre qui lui indiquait à chaque minute que son tour allait arriver. Lentement, Kataryna se leva du banc et envoya valser le livre qui s’écrasa lamentablement contre une armoire. Esquissant un sourire, elle allait être en retard. La roue tourne.

Les trois règles : Ne respecte jamais quelqu’un qui ne te respecte pas. Ne baisse pas jamais les yeux. Et surtout, ne te dis jamais que demander quelque chose à une personne est mal. Les mains dans les poches, Arrogance lui bourrait le crâne tout les jours avec ces règles qu’elle connaissait par cœur, à présent. Mélodie mortelle, souriante plus que jamais, la situation allait prendre une ampleur folle. Kataryna se mit à courir dans les couloirs, l’attente serait un supplice de plus pour lui, elle ne voulait tout de même pas qu’il meurt sous l’espérance de la voir arriver à l’instant même.

« Kataryna… »

Le réalisateur de la pièce aurait appuyé sur la touche PAUSE. Afin, de reprendre la scène sous un autre angle, mais Kataryna, elle, s’arrêta. Jamais, ô grand jamais Arrogance n’avait eu cette voix, il semblait déchu, triste, tout les adjectifs mélancolique pourrait y passer, mais la scène, était en vitesse normale. Comme toujours, la salle des trophées était magnifique, les lumières étaient tamisées, et certaines coupes volaient, autour d’elle, un nuage de fumer s’y dissipait. Un spectacle superbe.

« Quoi ? »

Des excuses, dites-vous ? Non, impossible. Ils se charriaient à longueur de journée. Ils jouaient au chat et la souris. Ils jouaient à des jeux d’enfants dont ils étaient les seuls à connaître le secret. Tout le monde les enviait, mais personne n’arrivait à les atteindre. Elle s’avança et se laissa tomber à ses cotés. Discrètement, elle tendit la main : La montre. Il devait la lui rendre. Il avait obligation, sans ça, Kataryna repartirait pour toujours.

FLASH – BACK :

« Je rigole pas, Arrogance. Cap ou pas Cap de dire NON la première fois que tu passeras devant l’autel ? »

« CAP ! »

A ce moment précis, une chaleur inconnue parcouru le corps de Kataryna. La première fois qu’Arrogance allait se marier, il allait devoir dire non. Un mariage pour RIEN. Un mariage pour du VIDE. Un sourire. Des méthodes machiavéliques.

« Et toi, Kataryna. Cap ou pas cap de ne pas me voir pendant dix ans après notre diplôme ? »

« CAP ! »

La déception, peut être ? De toute façon, quoi qu’on en dise, Kataryna était capable de tout. Du pire, comme du meilleur, mais dans le pire, Kataryna était la plus forte.

FIN – FLASH – BACK

I WANT TO PLAY.

La voilà. Belle, impériale. Arrogance serra la montre dans sa main, déchiré à l’idée de s’en séparer. Il eut un sourire, ce sourire si mélancolique, si doux, si triste. Il avança le visage et fit deux bises sur les joues de son amie. Quand il se redressa, la montre était dans la main de Kataryna. Il semblait au Russe que le métal lui brûlait encore le bout des doigts. Sa voix déchira le silence comme un hurlement bref :

« Bonsoir. »

Et après ça, que dire ? La partie allait commencer. Arrogance se préparait dans sa tête. Tout oublier. Oublier les codes, les règlements, les lois, les chartes, les constitutions, les décrets. Oublier le regard des autres, oublier le qu’en dira-t-on, oublier le mépris, oublier les moqueries, oublier les coups, oublier les autres. Oublier qu’il était trop vieux pour jouer, oublier que le danger le rattrapait, oublier que sa jeunesse lui filait entre les doigts. Il devait redevenir un enfant, inconscient de la dureté de cette vie injuste.

Il allait jouer, tout simplement, comme on jouerait aux cartes ou au ballon. Ce n’était que leur jeu d’enfant, ce n’était pas grave. Leurs actes n’avaient pas de valeur. Mais Arrogance savait que ce n’était pas du vent. Ils devaient respecter les codes de leur jeu : ils étaient « cap ou pas cap » et c’est celui qui le dit qui y est. Il ne faut pas revenir sur ce qui a été dit.

FLASH – BACK

« Et toi, Kataryna. Cap ou pas cap de ne pas me voir pendant dix ans après notre diplôme ? »
« CAP ! »

C’était la seule fois où Arrogance aurait voulu que Kataryna crie « PAS CAP ! ». Lui aurait dit ça, en tout cas. Ne pas la voir pendant dix ans ? En dix ans, les gens et les choses changeaient tellement. Seraient-ils les mêmes ? Arrogance aurait-il déjà dit « Non » à son premier mariage ? Que feraient-ils l’un sans l’autre ? Ce jour-là, Arrogance s’était perdu dans les bras d’Aaron, triste et alangui. Il n’avait rien dit, s’était juste calmé dans les bras de son cousin. Puis la vie avait repris son cours, normale, insidieuse, banale, tranquille et latente.

END – FLASH – BACK

Arrogance se racla doucement la gorge et se leva, toujours ce calme imperturbable posé sur son visage de marbre. Il tourna le dos quelques secondes à son amie, le temps de trouver les mots justes, puis il se retourna lentement, comme d’habitude, comme pour faire durer le suspense à chaque seconde :

« Alors. A quoi jouons-nous, ce soir, Kataryna ? »

Les mots justes. What else ? Rien. Seule la réponse comptait, désormais. Et Arrogance avait hâte d’entendre la réponse, comme d’habitude. Il avait envie de s’amuser.

Invité

Sans Arrogance, Kataryna serait juste une histoire comme ça, juste quelqu’un comme ça et sûrement juste une fille comme cela. Esquissant un sourire, il déposa sur ses joues deux baises. Son cœur s’emplit d’un bonheur presque parfait et sans s’en rendre compte, la montre était sienne.

« Bonsoir. »

« Merci. »

Les secondes, puis les minutes passaient. Le silence restait présent. Kataryna savait, elle savait qu’ils avaient toute la soirée devant eux, et qu’en cette faute, ce n’était pas à elle, à briser la glace. Elle émit un grand soupir, et se laissa glisser sur la banquette. Un contact. A l’instant même où elle aurait voulu lui prendre la main, Arrogance se leva et lui tourna le dos. Sans scrupules. A qui la faute ? Aurait-il fallut qu’elle parle ? Bourrage de cerveau.

« Alors. A quoi jouons-nous, ce soir, Kataryna ? »

Sourire. D’un bon, elle se leva. S’approchant d’Arrogance, elle laissa tomber sa tête sur ses épaules et les mains de la jeune fille s’envolaient sur les hanches du préfet. Non, le jeu ne commençait pas encore. Les caresses amicales sont le fruit d’une amitié trop forte, trop présente. Trop importante. Sans Arrogance, les yeux de Kataryna n’y verraient plus rien. Sans le cœur d’Arrogance, celui de Kataryna s’arrêterait.

« Regarde. »

Elle enfuit son visage dans le creux de l’épaule du jeune homme et lui murmura à l’oreille :

« Un accident est si vite arrivé, Arrogance. Appuis-toi sur cette étagère et les coupes tomberont les unes après les autres. »

Au final, elle ne posa même pas la question fatidique : « Cap ou pas cap. » Parce qu’au fond d’elle, elle savait qu’il allait le faire, comme il faisait tout, comme il risquait sa vie pour elle. Lentement, elle recula. Retirant ses mains de ses hanches, elle profita de la seconde qui lui restait pour toucher sa peau.

« Je n’ai pas fini. Faire tomber une armoire pleines de coupes, c’est facile. Moi-même j’aurai pu le faire. Pour te rendre la tâche plus complexe, je vais hurler, et m’enfuir. Quand tu ne me verras plus, tu feras tomber l’armoire et tu tâcheras d’éviter le concierge. »

La montre en main, le cœur serré. Kataryna tourna les talons. Un dernier regard, et le jeu allait commencer.

« Si dans cinq minutes tu n’es pas dans l’allée centrale, j’en conclurai que tu as perdu. »

Une inspiration.

« MAINTENANT ! »

En s’enfuyant, Kataryna poussait des cris, des hurlement stridents afin de réveiller le concierge.

» Je veux et exige...
» DAWSON - Tu veux ma photo ? [UC]