Réveil au chant du coq [PV]

COOCORICOOOO !! Le chant du coq résonne dans la Boutique. Oui c’était évident, dans tout ce bordel qui y régnait il devait bien y avoir un coq. Un jour Duncan avait même été persuadé d’avoir vu un troupeau de gnous cavaler dans les allées de l’arrière-boutique, alors un coq… c’était presque normal. Duncan était l’Intendant de la Boutique, ancien guérisseur talentueux, un sale caractère cynique et égocentrique. Il avait une particularité, il était enceint. Ceci était le résultat d’une malédiction, bref une histoire compliquée.

L’homme de bientôt 40 ans était dans son lit, maudissant le coq et jurant que le jour où il le trouverait il le plumerait allègrement. Se résignant à se lever, il alla à la fenêtre pour ouvrir les volets et laisser entrer la lumière du jour dans la pièce. Celle-ci se trouvait au-dessus de la boutique, une seule pièce, dans les combles du toit. Tout y était réunit, chambre, salon, cuisine et salle de bain. Duncan alla d’ailleurs se laver dans un grand bac en bois qui faisait office de baignoire. Ceci étant fait, il alla enfiler un jean taille basse et une tee-shirt ample puis se planta devant un grand miroir.

- Toujours pas de bébé, Mr Crack ? lui lança le miroir doué de parole.
- Quel talent d’observation… répliqua Duncan cyniquement tandis qu’il tentait en vain de cacher la totalité de son ventre de grossesse sous son tee-shirt blanc.
- Il faudrait peut être envisager d’autres solutions comme…
- J’ai déjà envisagé les autres solutions. J’suis Guérisseur j’te rappel, j’ai déjà essayé de faire sortir ce bébé par les voies les plus naturelles comme par celles les moins naturelles, j’ai tout essayé.
- Alors qu’allez vous faire ? Cela fait 12 mois que vous êtes… enceint.
- Je… Je n’en sais rien. Peut être… p’tète que ce bébé n’a pas vocation… à naître… J’en sais rien ! Et puis…. TA GUEULE !
- J’essaye de vous aider Mr Crack, c’est mon rôle de…

Trop tard, une chaussure a volé dans la glace et l’a fendue en deux avant que le miroir n’ait pu terminer sa phrase. Presque instantanément la surface de celui-ci se met à onduler et la fissure se répare.

- Comme chaque matin… grommela le miroir pour lui-même.

Duncan était en train de soulever une trappe dans le plancher et descendit l’escalier qu’il y avait en dessous. Refermant la trappe au-dessus de lui, il tapa la troisième marche du pied, trois fois. Immédiatement les marches disparurent laissant place à une surfasse plane et lisse, Duncan se laissa glisser tout en bas de l’escalier en colimaçon. Il eut d’u mal à se relever, son ventre de grossesse ne lui laissant que très peu de mobilité.

Il se trouvait à présent dans la Boutique. Il passa immédiatement dans la Hall qui était plongé dans le noir, d’un coup de baguette il donna plus de lumière et fit changer de face la pancarte accrochée à la porte indiquant que la Boutique était à présent ouverte. L’homme enceint pensa ensuite à déjeuner mais rien que de penser à de la nourriture il manqua de vomir, et oui, il avait également tous les symptômes de la grossesse. Les nausées matinales commencèrent à se faire sentir, il alla s’asseoir dans le fauteuil à haut dossier du bureau.

Une adresse... et un nom... Et c'était maintenant qu'elle s'en rappelait... Merlin... Où qu'il puisse être Cryptos devait probablement être attéré... ou avait peut être comprit pourquoi elle avait tant tardé... Soupir. Encore un matin où l'absence du vieil homme allait se faire sentir. Mais elle n'y pouvait pas grand chose. Sans un mot, elle s'était levé. Un baiser glissé sur le front d'Andreas, un regard aux berceaux dans la chambre d'à côté et une scéance d'habillage dans le noir. Elle ne commençait à travailler que dans quelques heures... Mais la curiosité étant ce qu'elle était... Elle avait envie de voir ce que l'adresse et le nom lui réservaient.

Les vêtements enfilés, elle sortit de chez elle. Merlin... Le soleil se levait à peine. Restait à espérer que le magasin soit ouvert. Tant pis, elle verrait bien de toute manière. D'un mouvement de la main et de la baguette, elle disparu dans un craquement...pour réapparaître au chemin de traverse. L'endroit était désert à une telle heure. C'était... étrange comme impression... presque angoissant. Mais elle avait passé l'âge depuis très longtemps d'avoir peur quand il n'y avait personne. Et d'ailleurs, cette solitude l'arrangeait assez. Elle s'avança, écoutant avec un certaine amusement invisible sur son visage à l'expression neutre, le bruit de ses pas qui ricochait sur les façades.

Pour un peu, elle aurait eut l'envie de flâner jusqu'à ce que les premières personnes arrivent au chemin. Mais non... Bon l'adresse... 666... C'était malin... Ou pathétique, au choix. Heureusement pour elle, Cryptos avait aussi prit soin d'indiquer que la boutique était simplement au 66... sans donner plus de précisions. 62...64...66... La seule boutique ouverte à une telle heure. Elle s'immobilisa, un sourcil haussé. Le propriétaire devait être aussi insomniaque qu'elle. Ni une ni deux, elle ouvrit la porte, plissant le nez en entendant celle ci gémir. Elle était à deux doigts de sortir sa baguette pour huiler cette fichue porte. Elle la referma avec délicatesse... si délicatesse il pouvait y avoir quand une porte faisait un bruit de chat ébouillanté au moindre mouvement...

Une fois à l'intérieur, elle s'immobilisa. Le temps pour elle de s'habituer au lieu. Quelques instants plus tard, elle faisait le chemin qui la séparait du bureau de son pas silencieux. Arivée à destination, elle dit d'une voix tranquille.

Iranoe -Bonjour...

Duncan s’affala dans le siège à haut dossier du bureau. Il avait la tête qui tournait énormément et dû fermer les yeux. Il n’en pouvait plus de cette malédiction, cette grossesse le rendait plus malade qu’une femme enceinte. Il avait dû ravaler toutes ses pulsions d’homme, d’ailleurs toute interaction sociale était quasiment impossible depuis 12 mois. Non pas qu’il était étrange qu’un homme puisse être malencontreusement enceint, en tant que Guérisseur Duncan en avait soigné plus d’un. Bien que les cas qu’il avait soignés résultaient tout le temps d’un accident magique et pas d’une malédiction. Non, ce qui était justement étrange c’est que Duncan n’arrivait pas à s’en débarrasser. Les gens pouvaient s’imaginer des trucs et Duncan avait peur que l’on remette en cause sa virilité.

Duncan était un beau gosse, c’était certain et à vrai dire son ventre de grossesse pouvait à la fois choquer et à la fois être un atout charme certain. Le mixe entre un corps musclé, bien entretenu et un ventre où grandit un bébé était étrange. La malédiction avait un sens, Duncan avait pour phobie l’engagement et qu’il y a-t-il comme plus grand engagement dans la vie que la naissance d’un enfant ? En résumé, Duncan flippait. Le fait qu’un enfant puisse grandir dans son ventre le rendait fou et la peur qu’il vienne au monde d’autant plus. Mais bon cela faisait plus de trois mois qu’il avait dépassé les neuf mois… réglementaires. Le bébé se portait très bien, bien qu’il ait arrêté sa croissance et se trouvait à présent dans un état de stase. Mais Duncan éprouvait toujours les symptômes chaque matin fortement et tout au long de la journée.

Ce matin c’était particulièrement dur. Il avait déjà vomis trois fois et avait mal dans le bas des reins. Aucune position n’était propice à réduire la douleur. Il avait chaud et ne tarda pas à enlever son tee-shirt. Bougeant sans cesse, il finit par monter sur son bureau et à se mettre à quatre pattes, les fesses pointées en l’air.

- Bonjour…

Duncan n’avait pas fait attention au grincement de la porte, trop habitué à son bruit. Une femme était entrée. Il était toujours dans la même position et n’osait pas la regarder. Il fixait le bois de son bureau avec attention. Un léger silence s’installa.

- Solidité du bureau… Bonne. dit-il comme s’il était en train de vérifier la solidité du mobilier de la Boutique.

Il finit par descendre péniblement du bureau et à retourner s’affaler dans le fauteuil à haut dossier. Son souffle était court, il semblait épuiser de l’effort qu’il venait de faire. Il regarda pendant un moment la jeune femme qui venait d’entrer. Aucun sourire ne se dessinait sur le visage de l’homme, celui-ci était juste crispé par l’effort.

- Qu’est-ce que… Qu’est-ce… Qu’est-ce que je peux faire pour vous ? lâcha-t-il dans un souffle.

Elle n'avait pas bronché d'un cil. Son expression neutre était resté la sienne, son regard était toujours à la limite de l'indifférence. Que l'homme soit perché sur le bureau, à moitié nu et les fesses pointées en l'air... le fait qu'il ait un ventre énorme comme le sien la veille de son accouchement... ne la choquaient pas plus que ça.. Du moins en apparence. Mais Iranoe était ce qu'elle était. Elle ne montrait jamais ce qu'elle pensait. Son regard était posé sur l'homme, attendant une quelconque réaction de sa part. En l'entendant parler de la solidité du bureau, elle esquissa un léger sourire... même pas moqueur ou narquois. Néanmoins, elle ne broncha pas pour l'aider à descendre du bureau.

Elle le suivit du regard tandis qu'il s'affalait dans le fauteuil. Elle plissa le nez. Il souffrait... c'était visible. Elle s'approcha d'un pas tranquille alors qu'il lui demandait ce qu'il pouvait faire pour elle. A vrai dire, elle ne savait pas vraiment ce qu'il pouvait... Elle avait simplement suivit les "instructions" de Cryptos.

Iranoe -Je... Je cherche Heather Crack... De la part de Cryptos.

D'autorité, elle passa derrière le comptoir pour lui faire face sans que le bureau ne soit un obstacle. Elle n'avait pas une attitude agréssive. Néanmoins, les prunelles argentées observèrent froidement l'homme face à elle. Il avait réellement l'air...enceint. Elle haussa un sourcil. C'était inhabituel. Elle finit par tendre uen main glacée et dit.

Iranoe -Levez vous. Je vais vous aider et tenter de vous soulager un peu...

Elle eut un léger sourire comme si elle l'invitait à lui faire confiance. S'il en venait à refuser, elle s'en fichait. Cela ne lui apportait rien de l'aider. Elle ajouta, comme si elle venait de se rappeler d'un détail.

Iranoe -Ah oui... j'ai quelque chose à cacher aussi.

- Je... Je cherche Heather Crack... De la part de Cryptos.

Toujours en train de reprendre son souffle affalé dans le fauteuil, Duncan marqua une pause dans sa recherche d’oxygène et plissa les yeux. Son regard, aussi vert que l’émeraude, détailla de la tête au pied la jeune femme qui lui faisait face. Ce moment passa et il continua a respirer bruyamment une nouvelle fois, une main sur son ventre rond, une autre appuyée sur sa tempe. La jeune femme s’approcha du bureau, monta les quelques marches de l’estrade sur laquelle il était posé et vint se placer derrière. Duncan la regarda de biais, un regard de bête sauvage blessée et emplit de méfiance, il ne montrait pas les crocs mais les deux émeraudes se tintèrent de noir.

- Levez vous. Je vais vous aider et tenter de vous soulager un peu...

Le sale caractère de Duncan réagit immédiatement il se leva et voulu s’écarter mais il se prit les pieds dans celui du bureau. La chute fut immédiate, il fit un vol plané du haut de l’estrade juste au pied d’une étagère. Un millième de seconde avant qu’il ne s’écrase au sol, un matelas sortit de l’étagère et vint amortir sa chute. Matelas qui ne semblait pas être là avant et qui d’ailleurs n’avait pas la place de se trouver dans cette étagère. Quelques casseroles, livres, légumes et autres objets incongrus s’étaient échappés avec lui de leur casier de rangement. Duncan ne fut pas vraiment surpris, c’était évident la Boutique devait protéger l’Intendant et a priori d’autant plus quand il était enceint.

- Ah oui... j'ai quelque chose à cacher aussi.

Duncan se relevait péniblement du matelas et interrompit son mouvement à l’énonciation de cette phrase. Iranoe ne pouvait pas le voir mais les deux émeraudes venaient de nouveau de s’éclairer. Duncan se releva et, d’eux-mêmes, les objets et le matelas allèrent reprendre leur place dans le bordel de l’étagère. L’Intendant marcha un peu dans la Hall jusqu’à faire face à Iranoe qui se trouvait sur l’estrade près du bureau. Elle était surélevée par rapport à lui et il ne tarda pas à la regarder en levant son regard.

- Bienvenue chez Crack & Co. Vous avez frappez à la bonne porte et suivit de bons conseils. Dites à la Boutique ce que vous voulez cacher et elle vous répondra à sa manière. Si elle vous répond positivement elle prendra l’objet et la cachera dans ses entrailles, autrement dit dans ce bordel, et jamais personne ne pourra l’en soustraire sauf dérogation de votre part. dit-il sur un ton des plus monocordes. Il fait une pause, baisse les yeux puis reporte son regard sur Iranoe. Il s’avance vers le bureau, attrape son tee-shirt et le renfile tout en reprenant la parole. Heather Crack est mort. C’était mon père, c’est à moi que vous allez devoir avoir affaire. Duncan Crack, enchanté.

Il finit d’enfiler son tee-shirt et prend soin de recouvrir son ventre rond. Soudain il ne bouge plus, comme si quelque chose venait de lui traverser l’esprit.

- … Cryptos… Il semble réfléchir. Il finit par se mettre au centre du hall et à tourner sur lui-même tout en regardant en hauteur vers les étagères qui faisaient plus de dix mètres de haut et qui pouvait donner le vertige rien qu’en les regardant. Quel est votre nom ? Il venait de s’arrêter de tourner et avait pointé son regard sur Iranoe, son visage était dur, presque agressif, ses yeux acérés, presque défiants.

Le regard noir qu'il lui jeta après qu'elle se soit approché se heurta de plein fouet à un regard neutre qui n'était troublé en rien... ni par une pensée, ni par une émotion. Un regard presque mort pour ceux qui n'avaient pas l'habitude de le croiser. Immobile, elle venait de lui proposer son aide mais en contrepartie, il s'était levé précipitamment et avait chuté... avec la grâce d'une baleine danseuse étoile. Elle tendit la main mais trop tard malgré ses réflexes et se fut à moitié paniquée qu'elle le vit faire un vol plané qui trouva sa fin sur un matelas. Pour un peu, elle en aurait rit. Mais elle ne connaissait pas celui à qui elle faisait face. Elle se contenta de le toiser sans que le moindre mépris ne puisse se lire dans son regard.

De toute manière, elle ne le méprisait pas. Elle se contentait de l'observer sans rien dire. Il se redressait avec difficulté et s'arrêta quand elle ajouta qu'elle avait quelque chose à cacher. Quelques instants plus tard, il lui faisait face. Elel écarta une mèche dans son geste habituel tandis qu'il déblatérait son discours. Par contre, elle haussa un sourcil en entendant que celui qu'elle était censée voir était mort. Elle eut un mouvement de la tête.

Iranoe -Désolée. Enchantée aussi.

La voix était à la hauteur du regard mais elle était teintée de douceur au moins. Elle ne bougeait pas de l'estrade tandis que lui si. Merlin qu'il était bizarre. Elle avait rencontré des cas au cours de sa vie... Mais lui atteignait des sommets. Elle ne voulait pas lui poser de question au sujet de sa grossesse... Simplement lui donner un conseil qui aurait pu éviter qu'il souffre un peu plus. Il n'en voulait pas... tant pis pour lui. Elle n'était pas sa mère.

Duncan -Quel est votre nom?

Elle plissa le nez, n'appréciant guère l'expression de son visage. Néanmoins, elle finit par lâcher.

Iranoe -Iranoe... Sayuri épouse Pravda.

- Iranoe... Sayuri épouse Pravda. répondit la jeune femme.

L’effet fut immédiat, la Boutique fut parcourut d’un souffle comme si un vent violent s’était engouffré par on ne sait où. Les étagèrent se mirent à vibrer dangereusement du haut de leur dix mètres, le sol fit de même. Tout cela se passa en une fraction de seconde puis le calme revint. Duncan n’avait pas bougé d’un cil, visiblement pas surpris du tout par le fait que le Boutique venait d’être secouée d’une force qui rendrait ridicule l’échelle de Richter. Lorsque le silence revint il sembla être en train d’écouter, la tête penchée vers l’avant, le regard dans le vide. Oui il écoutait quelque chose qui ne semblait être audible que de lui. Au bout d’un moment il releva la tête et porta son regard d’émeraude sur Iranoe.

- La Boutique a quelque chose pour vous, Mrs Sayuri. dit-il en se rapprochant du bureau aussi rapidement que lui permettait son gros ventre.

Il monta les quelques marches de l’estrade, contourna Iranoe et se rapprocha du bureau. Il pris l’unique plume et l’unique parchemin vierge qui s’y trouvaient. Aussitôt le parchemin perdit sa virginité et pris l’allure d’un document officiel. Duncan signa en bas à droite puis carra la plume d’or dans la main d’Iranoe et la fit signer en bas à gauche. Dès lors le parchemin se consuma dans des flammes d’or et réapparut vierge, posé au centre du bureau.

- On pensait que vous ne viendriez jamais le chercher celui-là. dit-il en descendant de l’estrade et en retournant au centre du hall. Cela fait quoi… 20 ans, 25 ans qu’on l’a. C’est pas énorme, certains restent des siècles, mais vu qu’il est un peu spécial je pensais qu’on viendrait le chercher rapidement. finit-il en se tenant le ventre alors que son visage était légèrement crispé de douleur.

Il se trouvait à présent une nouvelle fois au centre du hall et fit face à Iranoe.

- Vous êtes prêtes ? sans attendre de réponse de sa part il se mit à taper trois fois dans ses mains. Le temps semblait être au ralentit entre chaque applaudissement qui résonnait anormalement dans la Boutique. Après le troisième ‘clap’ il se remit à parler en regardant le plafond de la Boutique plus d’une dizaine de mètre au-dessus de lui. Qu’avons-nous pour Iranoe Sayuri ? cria-t-il alors que sa voix se répandait en écho.

Pendant quelques secondes, le silence s’installa. Rien ne vint le briser, tous les sons dans la Boutique semblaient frappés de mutisme et ceux de l’extérieur ne parvenaient plus à l’intérieur. Puis soudain la Boutique se mit à trembler une nouvelle fois, les étagèrent vacillèrent dangereusement et menacèrent de répandra toute leur contenu incongru. Un halo de lumière blanche venant de l’arrière-boutique s’engouffra dans le hall, il virevoltait dans les airs rapidement dans une trajectoire aléatoire et finit par s’immobiliser au centre de la pièce à quelques mètres devant Duncan. Le halo sembla émettre de plus en plus de lumière jusqu’à exploser en illuminant toute la pièce d’une lumière blanche et aveuglante. Lorsque la pièce retrouva sa luminosité naturelle, un vieil homme se trouvait à l’endroit du halo. L’homme était livide, transparent, presque irréel. Il était en train d’épousseter sa robe de sorcier blanche et de remettre sa longue barbe en ordre.

- Iranoe… dit-il en relevant enfin la tête. Son visage était emplit de compassion tout autant que sa voix. Un léger sourire y était affiché, un sourire presque légendaire.

A peine avait elle dit son nom que la boutique eut une réaction pour le moins... inattendue. Vaguement paniqué mais sans le montrer -on est maîtresse de soi ou on ne l'est pas - elle observa ce qu'il se passa autour d'elle après avoir posé sa main sur le bureau... histoire de ne pas faire comme l'homme quelques instants plus tôt et de se vautrer sur le sol... Parce que là, elle n'était pas certaine que la boutique allait lui sauver la mise. Elle n'était plus... enceinte et n'en était pas la propriétaire. Quelques instants plus tard, le silence revint. Elle n'aurait pas été sorcière, elle se serait probablement dit que l'homme était littéralement fou. Mais elle était une sorcière. Patiente, elle le laissa écouter ce qu'il avait à écouter et qui lui échappait littéralement.

Duncan -La boutique a quelque chose pour vous, Mrs Sayuri.

Tiens... Elle ne s'en était pas douté... Elle leva les yeux au ciel avant de les poser de nouveau sur l'homme. Elle ne bougea pas quand il la contourna. De toute manière, il avait besoin d'elle quelques instants plus tard. A sa demande plus ou moins muette, elle signa.

Duncan - On pensait que vous ne viendriez jamais le chercher celui-là. Cela fait quoi… 20 ans, 25 ans qu’on l’a. C’est pas énorme, certains restent des siècles, mais vu qu’il est un peu spécial je pensais qu’on viendrait le chercher rapidement.

Silence. Elle ne prit même pas la peine de se justifier. Il y a 20 ans, elle ne connaissait pas encore Cryptos personnellement et encore moins... 25 plus tôt. Enfin bref... Pas la peine de lui raconter sa vie. Si cela l'amusait de dire qu'elle avait été lente... Certes, elle aurait pu venir le chercher il y a plus d'une dizaine d'années. Mais elle n'avait réellement remarqué l'adresse et l'indication que maintenant. A croire qu'elle était apparue que ces jours derniers... Elle écouta à moitié sa question. De toute manière, il se foutait littéralement de sa réponse. Prête ou non, le résultat était le même. La preuve, il tapa dans ses mains avant de demander ce qu'il y avait pour elle.

Elle était bien curieuse de le savoir. Quelques instants plus tard, elle se retenait de nouveau au bureau. Question de précautions. Lorsque le halo sortit de l'arrière boutique, elle se tourna immédiatement vers cette source de lumière inattendue. Elle la suivit du regard, fermant les yeux quand la lumière fut insoutenable pour ses yeux clairs. Elle finit par rouvrir les yeux, papillonant pour parvenir à discerner ce qu'il y avait face à elle. Qu'est ce que la boutique avait elle bien pu préserver pour elle? Elle finit par distinguer une silhouette qui lui fait arracher une exclamation de surprise.

???? -Iranoe.

Un sourire lumineux se dessina sur son visage alors qu'elle descendait enfin de l'estrade. Elle s'avança vers le vieil homme et s'immobilisa à quelque centimètres. Elle demeura un moment silencieuse avant de demander.

Iranoe -Cryptos? Comment as tu pu? Je...

Silence. Même si elle avait conscience du statut éphémère de ce qu'il y avait face à elle, elle était heureuse. Cryptos... Le seul homme du monde magique qui avait été capable de lui imposer véritablement sa volonté.

Duncan resta un retrait. Il regardait la scène de loin, son visage était neutre et ne marquait nullement la surprise. Evidemment il connaissait Cryptos, mais il paraissait également au courant d’autre chose.

- Cryptos? Comment as tu pu? Je...

Le vieil homme ne répondit pas tout de suite, il sourit largement et ne bougea pas. Il sembla réfléchir pendant un moment. Dans sa main gauche il avait sa baguette, dans sa main droite son bâton de bois blanc. Son apparence était irréelle, on aurait dit un hologramme et pourtant il semblait si vrai.

- Cryptos… Oui, c’est ainsi que l’on me prénommait… dit le vieil homme fixant la jeune femme de ses yeux emplit de malice.

Le vieil homme tourna légèrement sa tête sur la gauche et regarda derrière lui. Il émit un léger signe de tête en regardant Duncan.

- Duncan.
- Cryptos.
- Toujours aussi sûr de me battre aux échecs ?
- Toujours.
Le vieil homme rigola légèrement dans sa barbe avant de reprendre.
- De combien de temps disposons-nous ?
Duncan ne répondit pas tout de suite, il sembla écouter pendant un instant, écouter quelque chose d’inaudible pour les autres.
- Elle dit que ça ne dépend que de vous.
- Bien… Très bien.

Le vieil homme finit par se retourner vers Iranoe. Duncan, quant à lui, retourne s’asseoir à son bureau, visiblement sujet à des contractions.

- Il y a tellement de chose que j’aurai à te dire Iranoe mais ce n’est ni le lieu, ni le moment. Il commence à marcher dans le hall, son pas à l’air aérien, ses pieds semblent glisser sur le sol. Je suis venu dans cette Boutique il y a de nombreuses années. J’ai fait connaissance avec Heather Crack, le père de Duncan et il m’a expliqué les capacités de cette Boutique. Crois-moi Iranoe si tu as quelque chose d’important à cacher, c’est ici. J’ai moi-même confié quelque chose à cette Boutique en des temps passé, quelque chose qui t’étais destiné. Ce quelque chose c’est ce que tu vois en ce moment même… Moi. Une partie de moi, un souvenir, une émotion, peu importe ce serait très compliqué à expliquer. Ce qui importe c’est le résultat, je suis ici pour un laps de temps court, très court, trop court sans doute. Il fait une pause avant de reprendre. Alors as-tu des questions avant que l’on ne passe à ce que pourquoi je suis là. N’importe quelle question, je tâcherai d’y répondre.

Le vieil homme finit par se rapprocher d’Iranoe et la fixa une nouvelle fois. Il n’avait vraiment pas changer, ni physiquement et a priori ni mentalement. C’était toujours le même avec sa dose incommensurables de mystères même lorsqu’il n’était plus de ce monde, c’en était presque agaçant.